mercredi 29 août 2007

QUAND L'OCCIDENT DEGAINE MEDIATIQUEMENT CONTRE LA CHINE



La guerre que mène l'occident à la Chine sur le plan économique semble avoir pris une tournure dramatique. On pense que désormais, tout peut arriver.

"Attention aux risques liés aux aliments chinois". Ainsi titre le site d'information Yahoo, reprenant une dépêche de l'AFP. Evoquant une étude commandée par le magazine Expansion, l'agence de presse annonce "qu'après les jouets et les tubes de dentifrices, c'est au tour des aliments en provenance de Chine qui présentent des risques graves de santé". Et de décliner la liste macabre qui fait frémir : "Colorants interdits découverts dans des sauces ou dans des gâteaux de riz, moisissures cancérigènes sur des fruits secs, résidus d'antibiotiques dans des lots de miel et de poissons, traces de mercure sur des anguilles ou encore stocks de nouilles incluant des composants génétiquement modifiés... la liste des ingrédients impropres à la consommation est longue, relève le magazine. Les ustensiles de cuisine en provenance de Chine détiennent eux aussi leurs lots de produits insalubres, puisque l'on retrouve sur divers articles des traces de nickel, de manganèse ou de chrome susceptibles de contaminer les aliments". Pour pas que les accusations ne soient sans fondement, l'AFP donne la parole à Christophe Zimmermann de l'organisation mondiale des douanes qui affirme que "sur les 2 millions de produits alimentaires contrefaits recensés dans le monde en 2006, entre 16 et 20% venaient de Chine". D'autres statistiques révèlent que "sur 924 produits dangereux recensés en 2006 par la commission européenne, 440 cas incriminés venaient de Chine, 21% des produits étaient d'origine européenne (19 pour la France, 42 pour l'Allemagne, 38 pour l'Italie, 14 pour la Pologne, 15 pour l'Espagne)"
Dans quelques heures, cette semence épandue par les agences de presse à travers le vaste réseau planétaire, fleurira dans plusieurs medias occidentaux sous des titres plus ou moins apocalyptiques, tentant ainsi de dresser l'opinion publique internationale contre le diable chinois. Loin de moins l'idée de soutenir ou de chercher à comprendre l'action des criminels qui, poussées par l'appât du gain, se permettent de servir des produits dangereux aux populations. Mais à y regarder de près, les choses ne seraient pas aussi simples.
On pouvait se douter de quelque chose. A savoir que, lorsqu'elle se sentira sérieusement menacée sur le champ économique par la Chine comme c'est le cas actuellement, l'occident fera recours, en attendant la provocation armée, à des méthodes éculées de la désinformation et de la manipulation des masses par les médias. Le fait pour les médias et les officiels occidentaux de tenter un dénigrement des produits chinois n'est vraiment pas nouveau. Ce qui est nouveau c'est le caractère presque synchronisé et gradué de la méthode désormais adoptée par l'occident pour combattre son concurrent chinois. C'est la manipulation grise. On part toujours des faits vraisemblable pour bâtir des fantasmes grossiers.
En effet, depuis qu'un certain nombre de classements plus ou moins sérieux ont placé la Chine au second rang mondial des exportations après les Etats-Unis et quatrième rang mondial pour l'industrie manufacturière, l'occident des officiels ne contient plus sa panique. Et elle est même passée à l'action. Sous le couvert du conflit du Darfour stéréotypé comme opposant d'un coté le méchant arabe soutenu par la Chine et de l'autre les pauvres noirs voués à un génocide certain, des groupes se sont organisés en occident pour appeler au boycott des jeux olympiques de Pékin. Et pour en rajouter à l'amalgame, les autres soutiennent que la Chine est la dernière dictature du monde. Les écologistes s'en mêlent aussi parfois pour dire que les chinois maltraitent les chiens ou encore qu'ils exterminent les baleines.
Concomitamment à cette action sur les jeux olympiques, d'autres groupes ont imaginé la diabolisation de l'origine chinoise des produits question d'effrayer les consommateurs et de les détourner des produits "made in china". Ces actions visibles viennent s'ajouter à d'autres actions de déstabilisation moins visibles qui relèvent de la pure guerre économique et dont les champs de bataille sont les principales places financières. Ainsi, les tentatives de déstabiliser le marché financier chinois se sont plutôt retournées vers les Etats-Unis où le secteur de l'immobilier a connu un mini crash dont l'onde de choc a atteint certaines banques en Europe. Pendant ce temps, la Chine, principale cible, continue de caracoler au sommet du hit parade économique. Provoquant plus encore l'ire de ses concurrents occidentaux.

D'Où VIENT LA CHINE?
Lorsque le commun de l'occidental parle de la Chine, c'est toujours avec une pointe de raillerie. Les produits d'origine chinoise sont nommés avec condescendance "chinoiseries" et le chinois est un plagiaire potentiel. On voit là l'influence des thèses particulièrement racistes d'Ernest Renan par exemple qui parla des Chinois comme la race des ouvriers sans aucun honneur.
Et pourtant, la Chine est un pays qui vient du fond des âges et qui semble avoir traversé toutes les étapes de sa maturité. En effet, "la Chine connut son unité entre 221 et 206 avant jésus Christ sous la dynastie de Qin, le premier empereur qui mit sur pieds un empire centralisé et unifié culturellement : l'écriture est standardisé ainsi que les poids, les mesures et monnaie". Qin Shi Huangdi est aussi entré dans la postérité en achevant la construction de la grande muraille. En 105 avant Jésus Christ, les Chinois inventent le papier.
Mais la Chine d'aujourd'hui, celle qui s'est enfin éveillé comme l'avait pressenti Napoléon Bonaparte, plonge ses racines dans la vaste révolution culturelle initiée dans les année 20 par Sun Yat Sen et accomplie de main de maître dans les années 40 et 50 par Mao Tsé Toung. C'est dans cette révolution que la Chine a implanté les fondations sur lesquelles elle a bâti son modèle économique. Un modèle qui est aujourd'hui un vrai mystère, un vrai serpent de mer dans la gueule duquel viennent se perdre toutes les recherches des plus célèbres économistes occidentaux. Ils parlent ainsi tantôt du communisme de marché ou encore du capitalisme rouge. Mais l'universitaire Qu Xing préfère parler, avec une pointe de fierté, du socialisme aux couleurs de la Chine. Au contraire du Japon par exemple qui avait évolué dans le sillage de la civilisation occidentale et qui était de ce fait maîtrisable, la Chine échappe à toute analyse.
En fait, c'est par son cynisme et sa cupidité que l'Occident a généré la Chine. On peut dire que l'Occident a fabriqué les pauvres et la Chine les a ciblés dans son modèle. C'est parce que les méthodes criminelles de la Banque Mondiale et du fonds Monétaire International ont appauvri les populations du reste du monde, créant des inégalités criardes, que le modèle économique chinois s'est installé et a fini par conquérir le monde. Ce modèle repose essentiellement sur le law cost. déjà pratiqué dans le modèle occidental pour cibler les segments de marché formé de personnes à revenu faible.
La Chine propose des produits de très faible durée de vie à un prix très faible. Le consommateur qui a aussi un revenu très faible est ainsi obligé de s'abonner aux produits chinois parce qu'il n'arrivera jamais à épargner suffisamment d'argent pour s'offrir le produit d'origine occidental et sensé avoir une durée de vie plus longue. Si l'occident fabriquait une paire de chaussure vendue à 120 euros et pouvant mettre 5 ans. La Chine propose la copie conforme de cette même chaussure fabriqué avec de la matière moins résistante pouvant durer six mois et vendu à 10 euro. Au bout de cinq ans, celui qui a choisi le modèle chinois aura acheté 10 paires de chaussure pour 100 euros. Il aura au final économisé 20 euros par rapport à celui qui a choisi le modèle occidental. En plus, il gagne à apparaître durant toute cette période avec plusieurs paires de chaussure parfois de modèles différents, à la différence de l'autre qui souffrira de la monotonie d'une seule paire de chaussure. Ce modèle s'approche d'un autre modèle pratiqué en occident et qui consiste à proposer des appareils à utilisation unique.
Voilà le fond du différend qui oppose aujourd'hui l'Occident à la Chine. Mais au lieu de poser clairement le problème, les stratèges occidentaux veulent passer par des subterfuges tendant à démontrer aux populations que la Chine est le nouveau diable contre lequel ils veulent les protéger. Et c'est là où se situe un amalgame insupportable.


UN AMALGAME INSUPPORTABLE :

La Chine en tant que pays et l'origine chinoise des produits incriminés sont deux choses bien différentes. Et pourtant, les accusations de l'occident réussissent à faire tenir les deux concepts dans une même et seule réalité.
La Chine est un pays qui, par ses mesures incitatives, a réussi à attirer les investisseurs du monde entier et à devenir ainsi une sorte "d'usine du monde". Ce pays est aussi attractif pour les investisseurs grâce à sa main d'œuvre bon marché. Avant la Chine, il y a eu le Japon, il y a eu les dragons d'Asie du sud Est, il y a Dubaï. Mais tous étaient sous le contrôle des puissances occidentales qui pouvaient à tout moment dicter leurs desiderata au gouvernement et faire faire leur volonté. Mais tel n'est pas le cas de la Chine qui s'autonomise.
Les produits "made in china" sont des marchandises fabriquées en Chine en majorité par les multinationales souvent d'origine occidentale qui ont été obligées de délocaliser dans l'empire du milieu. Bien entendu, beaucoup de produits sont aussi fabriqués par des entreprises chinoises à 100%.
Ceci dit, les produits dangereux en provenance de la Chine pouvaient bien être le fait des multinationales puisqu'on a vu que même des entreprises installées en Europe font de la contrefaçon et que la part des exportations européennes, japonaises et américaines représente près de 11% des exportations totales de la Chine. Ces produits pouvaient aussi être le fait des entreprises chinoises ou encore des réseaux de trafiquants.
Mais en visant la Chine dans l'oubli total des autres possibilités, les accusations occidentales fortement relayées par les médias veulent atteindre l'image de l'a Chine en tant qu'Etat à travers le scandale des produits dangereux. Si les accusations avaient voulu pousser l'analyse plus loin, elles l'auraient fait et nous auraient donné plus d'informations sur la nature réelle des mises en cause.
Pour comprendre le niveau de manipulation dans cette affaire, il faut prendre un autre scandale. Celui des déchets toxiques déversés à Abidjan visiblement dans le but de provoquer un soulèvement et renverser le régime de Laurent Gbagbo. Dans ce cas précis, aucun média ne s'était préoccupé de l'origine des produits toxiques, se contentant juste de dire qu'ils ont été transportés par un bateau prénommé "Probo-Koala" battant pavillon Panaméen. Par contre tous les médias insistaient sur la corruption du régime Gbagbo qui aurait favorisé une telle opération et une pancarte portée par un manifestant, probablement manipulé en disait long sur les visées des commanditaires de l'acte : "Nos dirigeants ont sacrifié le peuple sous l'autel de leurs intérêts en leur servant des produits toxiques". Il faudra lire entre les lignes des articles pour comprendre que l'affréteur du navire est "Trafigura Beheer" dont le siège est aux Pays Bas.
C'est ce traitement de deux poids deux mesures que l'ont peut dénoncer et comprendre que dans la guerre économique qu'elle livre légitimement à la Chine, devenue un concurrent sérieux, l'occident manque de fair-play et procède par manipulation pour faire gagner les populations à sa cause notamment en utilisant la peur et même la mort.
Ce faisant, l'occident me fait penser à un scénario du célèbre comédien camerounais Otsama Morbitsié. Il présente deux hommes politiques au cours d'une campagne électorale. Le premier est très brillant et très séduisant. Il maîtrise son sujet et soulève les foules quand il parle. Cela ne fait aucun doute qu'il passera comme une lettre à la poste. Quant au second, il est plutôt falot, incapable de s'exprimer devant un public. Mais lorsqu'il prend la parole il dit ceci : "Mon adversaire est très brillant. Je constate qu'il vous a déjà conquis. Mais sachez seulement qu'il a le Sida. Donc, si vous lui confiez le mandat, il mourra avant d'avoir atteint les objectifs qu'il fixe. A vous donc de choisir", avait-il conclu.
Pour éliminer un concurrent, l'occident a recours à des méthodes qui firent des ravages dans le passé mais qui aujourd'hui heureusement n'emballent plus personne.

QUE LES TEMPS ONT CHANGE!

Les spécialistes occidentaux de la désinformation et de la manipulation devraient sérieusement réviser leurs méthodes pour s'adapter au nouveau monde du tout communication. Ils devraient comprendre qu'aujourd'hui, les grands médias n'informent plus exclusivement. Et que dans la formation de l'opinion publique, ces médias ont été relégué au second plan. Ils servent simplement de complément d'information à un public de plus en plus informé par d'autres médias plus citoyen et plus de proximité comme Internet ou le téléphone portable.
Par le passé, la tactique était simple. Les services de renseignement occidentaux manipulaient les médias qui à leur tour manipulaient l'opinion publique dans le but de provoquer un soulèvement populaire dans le pays ciblé et obtenir la caution de l'opinion publique occidentale. Ceci aboutissait très souvent au coup d'Etat en vue du remplacement d'u régime insoumis. Ceci a donné les vrais faux charniers de Timisoara en Roumanie qui contribuèrent à l'exécution de Nicolae Chaucescu. Ou la vraie fausse chair humaine révélée dans les congélateurs de Bokassa à Berengo par les militaires français, ce qui a permis le renversement de l'empereur bouffon Jean Bedel Bokassa. Ou encore plus récemment les vraies fausses armes de destruction massive détenues par Saddam Hussein et qui permirent l'envahissement de l'Irak par l'armée américaine et finalement la pendaison de Saddam Hussein.
Il y a quelques semaines, certains pays occidentaux en tête desquels les Etats-Unis et la Grande Bretagne ont tenté d'instrumentaliser le sommet de la Sadc en vue d'obtenir la mise en quarantaine du président zimbabwéen Robert Mugabe. Auparavant, une campagne médiatique particulièrement pernicieuse tendait à lui faire porter la responsabilité de la ruine du pays où la même campagne annonce le chiffre démentiel de 5000% d'inflation. Mais au lieu des sifflets comme l'espéraient les occidentaux, Mugabe a plutôt eu droit à une sorte de standing ovation de la part de ses pairs. C'est parce qu'ils savent que, bien que Mugabe soit un despote qui a depuis dévié de sa trajectoire de libérateur, les raisons présentées officiellement par les occidentaux pour réclamer sa tête, à savoir qu'il fait souffrir son peuple, ne sont pas suffisantes. Bien d'autres chefs d'Etat infligent des pires souffrances à leurs peuples et pourtant les mêmes pays qui s'acharnent sur Mugabe leur déroulent le tapis rouge.
Toutes les actions de désinformation visent à conditionner le peuple et obtenir sa caution pour la conduite des opérations dont seuls les dirigeants politiques et la nomenklatura proche sont les principaux bénéficiaires.
Pour revenir sur le cas chinois, une évaluation de la campagne de manipulation de l'opinion publique est faible sur le site : fr.answers.yahoo.com où cette question fortement suggestive est posée aux internautes : "Après tout (sic) les produits dangereux exporter (sic) par la Chine, continuez-vous à acheter chinois?" Répondez à cette question sur yahoo! Dans les réponses, beaucoup vont dans le sens voulu par les initiateurs du sondage. A savoir qu'il faut bannir les produits chinois parce qu'ils sont essentiellement dangereux.
A travers ces quelques exemples, on entrevoit le danger qui guette la société occidentale où on assiste à un net recul de la démocratie. Si la démocratie dans sa représentation scénique est toujours perceptible au travers des institutions, les libertés individuelles et collectives, gages de la démocratie à la base, reculent dangereusement. Chaque jour, les dirigeants politiques inventent des scénarios toujours plus apocalyptiques pour confisquer les libertés des citoyens et renforcer leurs propres pouvoirs. Ainsi, pour aussi paradoxal que cela puisse paraître, ceux qui en occident prétendent répandre la démocratie dans les sociétés non "civilisées" vendent en fait un bien qu'ils ne possèdent plus.
De loin, on pense que les peuples de l'occident sont celles qui ont le plus approché la liberté. Mais de plus près on constate que ce sont des peuples en passe de devenir ceux les plus manipulés et même les plus conditionnés de la terre. Tous les moyens modernes de communication sont mis en œuvre pour occuper ce peuple au point de ne lui laisser aucun moment de lucidité. Je pense que les civilisations rentrent dans leur phase de décadence lorsque les peuples, pris dans la spirale de la manipulation, ne sont plus en mesure ou n'ont plus la lucidité de contrôler et sanctionner les actes de leurs dirigeants. Lesquels peuvent se permettre toutes les folies jusqu'à ce que un jour, sans qu'on sache comment, tout s'écroule.

Par Etienne de Tayo
Promoteur du réseau de journalistes pour l'intégrité en Afrique "Afrique Intègre"

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Dis Etienne, on ne peut t'écrire directement qu'en faisant un commentaire à la suite d'un article? En tout cas bon courage et à bientôt.
Mes email:ryimgatatchi@snvworld.org ou yimga@web.de