dimanche 19 octobre 2008

UN SMS AU G8 : "LES PAUVRES VOUS EMMERDENT"


Alors que la bombe des siècles d'exploitation, de spéculation et de manipulations diverses vient de leur exploser entre les mains, les dirigeants du G8 croient toujours à leur puissance et à leur capacité à prendre en main la misère du monde, du moins, à faire semblant de la prendre en main à travers des promesses fallacieuses.

C'est ainsi que certaines ONG néocoloniales n'ont pas hésité à faire cette déclaration en direction des pays occidentaux : "N'oubliez pas les pauvres, n'oubliez pas l'Afrique, ne supprimer pas l'aide publique au développement". Ce qui est dommage, c'est qu'un tel appel trouve souvent écho en Afrique auprès de certains suppôts qui répondront : "Oui, vraiment ne nous oubliez pas".
Pour celui qui suit l'actualité de ces derniers mois, cet appel a quelque chose de curieux et même d'anachronique et ne manquera pas de susciter quelques questionnements : Comment et pourquoi des pays qui font face à une violente crise, qui n'ont plus le contrôle de leur propre système et qui peinent à offrir un pouvoir d'achat acceptable à leurs propres peuples ou même tout simplement à les rassurer par rapport à l'avenir, s'entêtent-ils à vouloir se présenter comme des sauveurs d'autres peuples? Où trouveront-ils les fonds nécessaires à cette ultime opération humanitaire? Pourquoi toujours ce paternalisme rampant?
La manœuvre consiste pour le G8 à continuer à faire courir l'illusion de la puissance et tenter d'avoir le monde à ses pieds. Et pourtant, la réalité milite largement contre lui. L'écroulement du système financier international – ce qui était d'ailleurs prévisible quand on sait que les spéculateurs de tout bords avaient réussi à transformer l'économie mondiale en un vaste casino – devrait ramener le G8 et ses dirigeants sur terre. Plus que le seul système financier, c'est tout le modèle de développement mis sur pieds au lendemain de la seconde guerre mondiale par les vainqueurs qui montre ses limites. Et cela devrait être riche d'enseignement pour les pays en développement qui cherchent encore leur voie pour le développement.
Ce que l'Afrique, toujours présentée comme l'éclopée par les dirigeants du G8, aura gagné dans cette crise, c'est de comprendre que le système qu'on lui proposait comme passage obligé pour la prospérité est un système piégé par ses propres turpitudes. C'est de se résoudre une fois pour toute à rechercher sa propre voie pour le développement.
Ce que le reste du monde a gagné de cette crise, c'est 'avoir des dirigeants du G8 moins arrogants et qui pour la première fois comprennent qu'ils peuvent se remettre en question sans complaisance. C'est ce que le président Français Nicolas Sarkozy fait lorsqu'il affirme qu'on ne peut pas gérer le 21e siècle avec les lois du 20e siècle. Le président français qui dénonce sans ambages les paradis fiscaux, les hedge funds, les spéculations en bourse, en fait les travers de ce système délirant, sollicite auprès de Georges Bush l'organisation d'un G8 consacré à la refondation du système financier mondial. Et lui de rêver avoir au cours de ce sommet du G8, les puissances émergentes telles l'Inde et la Chine. Pourquoi les solliciter aujourd'hui alors qu'on les a toujours regardé avec condescendance?
Mais Georges Bush, qui veut être le dernier soutien de ce système qui s'écroule prévient : "Faut pas toucher aux fondamentaux de l'économie de marché". Une déclaration paradoxale quand on sait que c'est ce qu'il a fait lorsqu'il a fait voter une somme de 700 milliards de dollars pour venir en aide aux entreprises en difficulté. En réalité, une nationalisation ou à tout le moins une subvention qui ne veut pas dire son nom.

Une remise à plat du système
Ce que le monde attend aujourd'hui de ses dirigeants y compris ceux du G8, ce n'est nullement un replâtrage du système le ou des petites combines qui permettront aux plus malins de continuer à piller les richesses des moins malins pour ensuite les dominer, mais plutôt une intervention systémique qui remettra à plat le système pour faire que les appareils en charge de la gestion de l'économie globale du monde soit en rapport avec la nouvelle configuration de ce monde au 21e siècle.
Les institutions de Bretton Woods et leurs excroissances, ces institutions qui ont servi aux vainqueurs de la deuxième guerre mondiale de se présenter comme les plus puissants du monde et de profiter de cette manœuvre pour soumettre les autres peuples de la planète, doivent être révisé de fonds en comble à défaut d'être supprimé. En réalité, la banque mondiale et le Fmi devront passer devant le tribunal de l'histoire pour avouer le fait que de façon tout à fait artificielle, elles ont bloqué la croissance et semer la misère dans la plus part des pays en voie de développement. Mais le problème n'est même pas à ce niveau. Le problème est d'avouer que ce système a échoué. Il a échoué parce qu'il était mauvais. Il a échoué parce que au lieu de miser sur l'homme comme l'alpha et l'oméga du développement, il a misé contre l'homme, il a misé pour la richesse même si cette richesse devra être obtenu au prix du sang des humains.
Depuis plus de 50 ans, les pays en développement, généralement libérés de la colonisation, revendiquent dans tous les fora internationaux les nouveaux ordres mondiaux : le nouvel ordre mondial de l'information et de la communication (Nomic), le nouvel ordre mondial du commerce, le nouvel ordre mondial de l'économie. Mais les pays dits riches, du haut de leur arrogance, n'en ont fait qu'à leur tête. Ils ont pris en otage toutes les institutions de régulation à commencer par l'ONU, l'OMC, l'Unesco… Ils ont piétiné tous les traités internationaux visant à humaniser le monde : le traité de Rome créant la CPI et visant à juger les criminels de tout bords, le traiter de Kyoto sur la protection de l'environnement.
Depuis l'effondrement de l'union soviétique, le système occidental de l'économie de marché était devenu le seul maître à bord du bateau monde. Il tenait solidement et jalousement le gouvernail. Ce système triomphant a commencé à imposer ses deux instruments majeurs de domination que sont l'économie du marché et la démocratie même s'ils leur fallait parfois des fourgons blindés pour livrer ces marchandises. Mais force est de constater qu'il nous a conduit tout droit dans un mur. Mais voilà que les vainqueurs d'hier, mais perdants d'aujourd'hui, veulent encore se retrouver juste pour ajuster leurs appareils de domination et trouver la meilleure position pour exploiter le reste du monde et le maintenir dans la position d'éternel dominé. Est-ce possible?
Ce qui est possible aujourd'hui, c'est introduire une bonne dose de justice dans les nouvelles institutions qui vont remplacer celles qui nous ont amené là où nous sommes aujourd'hui. C'est par exemple au niveau de l'OMC, créer les conditions d'un commerce équitable au lieu d'imposer la loi du plus fort comme c'est le cas aujourd'hui à travers les APE; c'est neutraliser l'action des fonds d'investissement spéculatifs qui portent une lourde responsabilité dans la dégénérescence du système financier mondial à travers l'industrie du risque et les parapluies dorés pour des managers transformés en chasseur de bénéfice même en pressurant les employés; c'est demander par exemple à la France de libérer l'Afrique francophone en leur permettant d'abandonner le Franc des Colonies Françaises d'Afrique (F CFA) pour créer leur propre monnaie et booster ainsi leurs économies; c'est faire de la gouvernance mondiale la préoccupation majeure de tout le monde, ce qui permettra à l'Afrique de toucher le juste prix de ses matières premières et promouvoir son développement sans avoir besoins de l'aide de qui que ce soit; c'est démanteler les réseaux maffieux qui continuent d'habiter les relations entre certains pays colonisateurs et leurs anciennes colonies; c'est d'accéder à la demande des pays en développement d'instaurer un nouvel ordre mondial dans tous les domaines : économie, culture, finance, communication…
Lorsque toutes ces dispositions seront prises, les pays en développement en général et ceux d'Afrique en particulier pourront actionner un développement endogène à partir de leurs ressources propres, à partir de leur force de travail. La prospérité qui s'en suivra entraînera le retour des Africains de la diaspora et à travers l'effet multiplicateur l'Afrique retrouver la place qui est la sienne, c'est-à-dire d'un continent d'avenir. Vous comprenez qu'il n'y aura plus de place pour des discours misérabilistes tendant à solliciter l'aide publique au développement.

Par Etienne de Tayo
Promoteur Afrique Intègre
http://www.edetayo.blogspot.com/

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