vendredi 17 avril 2009

PROSPERITE ET PAUVRETE DES NATIONS : L'ECONOMIE MONDIALE FACE AU DEFI DU DETERMINISME MORAL


La crise financière et économique que traverse le monde actuellement risque d'être plus longue et plus dévastatrice. C'est du moins l'une des prédictions de Joseph Stiglitz, le prix Nobel de l'économie en rupture avec le consensus ambiant. La crise sera d'autant plus meurtrière qu'elle a trouvé des dirigeants du monde populistes, retors et hypocrites. Ils préfèrent à la franchise du discours – ce qui contribuerait à donner la mesure réelle des défis et préparer les esprits à les affronter – une sorte de cache sexe rhétorique qui en réalité ne cache rien. Et qui révèle plutôt la face immorale qu'arbore le système financier mondial.

Au sortir du sommet du G20, les Etats participants ont décidé l'ouverture des économies comme l'une des conditions majeures de la réussite des réformes. Or, selon Stiglitz, "sur les 20 membres du G20, 17 ont déjà pris des mesures protectionnistes en contradiction avec les engagements pris". A commencer par les Etats-Unis qui ont font la promotion du "Achetez Américain". Sans compter que la plupart des pays riches, continuent d'arroser les agriculteurs des subventions qui créent comme on sait des distorsions pour la compétitivité des autres pays, surtout ceux les moins avancés.
Il est difficile voire utopique de prétendre conduire une régulation globale et concertée de l'économie mondiale. Tant les divergences sont grandes entre les pays et le risque que chacun balaie d'abord devant sa porte est énorme. C'est un peu comme si les conducteurs d'un même train s'entendaient pour accélérer et que individuellement, chacun freinait en cachette ou qu'ils s'entendaient pour freiner et qu'individuellement chacun accélérait en cachette.
C'est vrai qu'en matière de gestion d'une crise économique, il faut éviter de céder à la panique au risque de déclencher des effets systémiques parfois incalculables. C'est vrai aussi qu'une certaine médecine dit qu'ignorer l'ampleur de la maladie est déjà en soi un bon début de traitement. Mais encore faut-il que la maladie soit plus psychologique que somatique. Or tel n'est pas le cas de la crise économique qui a un impact chiffrable la santé économique, qui a une incidence palpable sur le vécu quotidien des populations. Elles la ressentent comme on ressent le froid dans les pôles et comme on ressent la chaleur au désert. Suite à une crise économique dont le corollaire est la récession, une nation peut passer de la prospérité la plus insolente à la pauvreté la plus abjecte.

La théorie
En 1776, l'économiste Adam Smith publie son ouvrage fondateur du libéralisme économique : "Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations". Dans cet ouvrage, il développe trois idées forces : "l'ordre naturel, l'individualisme et la main invisible". Il fait reposer les causes de la richesse des nations sur deux piliers : le travail comme source de formation initiale du capital et les échanges. Ainsi, soutient-il :"le travail annuel d'une nation est le fonds primitif qui fournit à sa consommation annuelle toutes les choses nécessaires et commodes à la vie. Et ces choses sont toujours ou le produit immédiat du travail ou achetées des autres nations avec ce produit". Malgré le caractère empirique de son étude, on constate néanmoins qu'Adam Smith a produit un ouvrage plus éthique que pragmatique. Il n'a pas voulu partir de ce qui est pour faire ses recommandations. Mais il a voulu directement suggérer ce qui devrait être. Il a construit son discours en ignorant ce qui est et en espérant que ses théories aideront à changer la donne dans le monde. Car, en effet, il lui suffisait déjà à son époque de regarder juste autour de lui pour constater que les causes des richesses des nations relèvent essentiellement de l'immoralité. Peut-être ne pouvait-il pas voir parce qu'il était d'abord professeur de philosophie morale.
Aussi bien hier qu'aujourd'hui, la richesse des nations, au-delà des causes honorables qu'évoque Adam Smith a toujours reposé sur un socle de l'immoralité. Cette richesse, les nations riches l'ont obtenue en pillant les patrimoines des civilisations déclinantes. Ainsi, les Egyptiens, les Mayas, les Asthèques, les Romains… ont vu leurs trésors emportés par des explorateurs de tout bord. La deuxième cause c'est l'esclavage et le travail forcé qui a permis aux nations riches d'aujourd'hui d'amasser des richesses en exploitant la force de travail des peuples soumis. La troisième cause, ce sont des connexions coloniales qui ont permis aux nations coloniales d'exploiter les ressources du sous-sol de leurs colonies. Et plus le monde s'humanisait, plus les méthodes toujours immorales d'accumulations des richesses se sont multipliées en se raffinant. On parle ainsi aujourd'hui de paradis fiscaux, de secret bancaire, de hedge fund… Il y a aussi la dialectique de la destruction reconstruction à travers des guerres impérialistes comme en Irak, en Afghanistan, au Kosovo… Ces instruments frauduleux sont tellement prégnants dans le fonctionnement des nations qu'on en vient à se demander si un pays peut goûter aux délices de la prospérité économique sans avoir y recours. D'où l'idée d'un certain déterminisme immoral. L'homme Adam-smthien est appréhendé dans son état de nature c'est-à-dire qu'il échappe à la contrainte de l'Etat moderne seul détenteur du monopole de la violence légitime. Cet homme là, que célèbre le capitalisme au sens le plus libéral du terme, peut facilement basculer dans l'immoralité. C'est cet homme là qui a l'habitude de dire que l'Etat n'est qu'un appendice de ses affaires privées.

La pratique des promesses
A l'issue de leur récent sommet, les membres du G20 ont promis d'insuffler un substrat moral au capitalisme. Cela passe par le démantèlement de tous les mécanismes frauduleux qui émaillent le fonctionnement du système financier. Prenons donc le G20 au mot et supposons qu'ils vont parvenir à la moralisation et à l'humanisation du capitalisme. Dès lors, plusieurs questions s'offrent à nous : maintenant que l'éthique des affaires va être restaurée, sur quoi les nations dites riches vont-elles faire reposer désormais les ressorts de leur prospérité économique? Ne courent-elles pas finalement vers un déclin inexorable? Par ailleurs, comment les nations dites pauvres peuvent-elles profiter de cet assainissement du monde des affaires pour se tailler une place qu soleil et construire leur propre prospérité? Le capitalisme est-il vraiment intimement lié à l'immoralité comme pensent certains?
J'avais rédigé une réflexion dans laquelle je m'insurgeais contre des formes d'escroqueries développées par certains Africains dans le monde et connu au Cameroun sous le nom de "Feymania". Le titre de cet article était : "Feymania : non à la légitimation du crime". Dans cet article, je réagissais à un article dans lequel, l'auteur essayait de construire un contenu idéologique pour la feymania. Notamment en disant par exemple que l'action des feymen est louable parce qu'elle permet de récupérer les richesses que els autres nations avaient volées à l'Afrique pour devenir plus riche. Je trouvais qu'il s'agit d'un fabuleux raccourci juste pour se soulager la conscience d'escroc et que rien ne pouvait servir d'explication et a fortiori de justification à de l'escroquerie..
Un lecteur qui réagissait à mon article m'a trouvé bien naïf. Il m'a dit en substance que toutes les nations qui se sont développées ont utilisé les services des pires brigands et de pires escrocs pour spolier d'autres peuples. On les appelait joliment explorateurs. Du haut de ma morale, je lui ai rappelé que, même si cela était vrai, les Africains n'étaient pas obligé d'emprunter les mêmes voies que ces nations amoralement riches. Je lui ai dit, déclinant ainsi ma conviction profonde, que l'Afrique doit emprunter la voie de la fierté et de la dignité, quoi que cela lui coûte. Pour cela, il est hors de question de plonger comme tout le monde. Il m'a répondu qu'alors, nous attendrons la prospérité longtemps ou devons nous tout simplement nous inscrire au rang des éternels clandestins de la planète. Il trouvait ma démarche à la fois utopique et naïve.

Le déterminisme immoral
Il posait là sans le savoir, le déterminisme immoral de la réussite dans les affaires. Il posait le problème de la formation initial du capital. En clair, où doit-on tenir la fortune nécessaire à la fructification? Cette question se pose autant à un individu qu'à une nation. Mon contradicteur ne se posait pas la question supplémentaire. Il disait qu'il faut encourager les escrocs à amasser la fortune nécessaire à la formation initiale du capital nécessaire au décollage économique.
Aujourd'hui, l'effondrement du système financier a révélé des escrocs de gros calibre de la trempe de Bernard Madoff, spécialiste des montages financiers frauduleux qui se singularise par l'éloquence de son tableau de chasse ou encore Allen Stanford, un richissime homme d'affaire texan accusé aujourd'hui de fraude pyramidale. N'est ce pas de simples feymen d'un autre genre? Pour autant, devrais-je encourager la feymania? Une fois de plus, non! L'effondrement du capitalisme à l'occidental montre bien les limites de cette approche. IL faut se démarquer des approches manichéennes. Entre le capitalisme sauvage et le communisme soporifique, il y a bien quelque chose de plus humain. Appelons cela : un capitalisme à visage humain ou un socialisme moins naïf et moins utopique. C'est ce qu'il faut à l'Afrique.

Etienne de Tayo
Promoteur Afrique Intègre
Auteur de l'ouvrage : "Pour la dignité de l'Afrique, laissez-nous crever"

http://www.edetayo.blogspot.com/

dimanche 5 avril 2009

LE G20 (G8) FACE AU TRIBUNAL DE L'HISTOIRE


La crise financière et économique que traverse le monde actuellement fera des millions de victimes humaines dans le monde. Cela se voit déjà avec une augmentation fulgurante du nombre des suicides dans les milieux professionnels en France par exemple. Mais avant, elle a fait une première victime de taille. Dès les premiers signes de la crise, le G8, un regroupement de pays que le "consensus politico-médiatique" caractéristique de la réalismologie ambiante, présentait comme les plus puissants du monde, s'est dissout dans le G20. Ainsi s'achevait la plus grosse imposture de ce début du 21e siècle. Mais la dissolution du G8 ne saurait arrêter l'action judiciaire même symbolique, qui doit être conduite contre cette organisation, tant sa responsabilité dans l'avènement de la crise semble aujourd'hui évidente.

Dans un brillant article intitulé "la crise et les cassandre", Alexandra ROULET, diplômée de l’Ecole d’Economie de Paris, chercheur associé à l’Institut Thomas More, prenant la posture de "juge d'instruction", nous donne les ficelles de ce qui ressemble à un vaste complot monté contre l'économie mondiale et contre les couches les plus vulnérables de la population mondiale. Nous nous inspirerons largement de cet article d'Alexandra dans cette réflexion.
La crise, nous la ressentons déjà gravement aujourd'hui avec la fermeture en cascade des entreprises, les licenciements massifs, les patrons de plus en plus pris en otage par les employés désemparés. Et pourtant, selon Alexandra Roulet, "nous n'avons pas encore atteint le point bas de la crise". Si l'on en croit les prévisions toujours plus pessimistes, ce sont des pans entiers de la société monde qui seront poussés sur le bord du chemin. La misère fera son lit dans les couches les plus vulnérables. La maladie et la mort reconnaîtront les leurs. Il est donc urgent d'établir les responsabilités de cette débâcle aux niveaux les plus élevés au lieu de se contenter, comme c'est le cas actuellement, de réprimander quelques lampistes qui n'auront été que de simples exécutants. Il devient de plus en plus évident que ce système de spoliation des pauvres a consciencieusement été pensé et mis en œuvre par des dirigeants du monde. Il est donc urgent, sans plus attendre, de convoquer le G8 au tribunal de l'histoire.
En publiant en 2006, un ouvrage coup de gueule au G8 intitulé : "Pour la Dignité de l'Afrique, laissez-nous crever. Mais nous ne crèverons pas", j'entendais m'élever contre ce que je considérais comme une arrogance insupportable mais surtout une instrumentalisation misérabiliste de l'Afrique par les dirigeants du G8. Mais je ne percevais pas encore le danger que ce regroupement faisait courir au monde en instituant des collusions d'intérêt dangereuses entre les pouvoirs et les milieux du business.
Dans son enquête, "la juge d'instruction", Alexandra Roulet, fait parler ceux qu'elle présente comme des cassandre, c'est-à-dire toutes ces personnes, aussi bien des théoriciens que des praticiens qui, gardant la lucidité devant la déraison généralisée, avaient eu le courage, des années à l'avance, de tirer la sonnette d'alarme en dénonçant "les limites d'un système fondé sur l'endettement excessif et sur une titrisation mal maîtrisée".
De Maurice Allais, le seul prix Nobel français d'Economie à Jean Pierre Mustier, PDG de la société général en passant par Nassim Nicholas Taleb, trader à New York pendant 20 ans et surnommé "le dissident de Wall Street", David Androkonis, chef du département de gestion du risque chez Freddie Mac ou encore Harry Markopolos, spécialiste des produits dérivés, tous, chacun dans son domaine de compétence, ont attiré l'attention des décideurs sur le péril que courait la Finance et partant l'Economie mondiale. Mais tous ont été marginalisé par le "conformisme social" en cours dans le secteur. C'est vrai que, comme le souligne Alexandra, tous ces cassandre sont aujourd'hui perçus comme des "prophètes éclairés". Trop tard.
Dans son article, après avoir déroulé les prédictions des cassandre, Alexandra Roulet veut comprendre. Et pour cela, elle pose la question générale de recherche suivante : "comment expliquer que ces avis n'aient pas été pris au sérieux et que (…) n'ait été fait pour empêcher la crise de survenir?". Nous prolongerons cette question de recherche mais en voulant comprendre comment beaucoup d'actions ont été prises et beaucoup de rendez-vous ont été manqués, pour favoriser l'avènement de la crise.

Des curiosités
En feuilletant les éléments de preuve fournis par Alexandra Roulet, on constate que les principes élémentaires de l'Economie ont été foulés au pied. De même, des actions particulières ont été engagées au niveau des décideurs aussi bien aux Etats-Unis qu'au niveau de l'union européenne pour favoriser le dérèglement de l'Economie et permettre à certains comportements de se cristalliser.
En 1998, Maurice Allais, cité par Alexandra Roulet, s'inquiétait déjà en ces termes : "le mécanisme actuel de la création de monnaie par le crédit est certainement le cancer qui ronge irrémédiablement les économies de marché de propriété privée". Il relevait en effet des curiosités telles que le "financement d'investissements à long terme par des fonds empruntés à court terme". Ce qui est en soi le B-A BA de l'économie. Il dénonçait aussi le fait que "les bourses soient devenues de véritables casinos". Pour sa part, Nassim Nicholas Taleb dénonçait la mathématisation de la Finance et les modèles de probabilités sophistiqués destinés à duper les investisseurs". A la suite de Taleb et pour confirmer son assertion, nous dirons que dans les écoles de la haute finance, on ne forme plus les jeunes, mais on les déforme toujours dans cette perspective de duperie de l'autre.
On sait aujourd'hui que les subprimes sont le coin de la brousse d'où est parti le feu qui a embrasé la Finance mondiale. Pourtant, comme le révèle Alexandra, "dès 2004, alors que s'engageait chez freddie Mac, un débat sur l'idée de commercialiser des subprimes pour conquérir des parts de marché, David Adrukonis "mettait en garde ses collègues contre ces produits qui avaient été catégorisés, en 1990, comme dangereux et écartés du marché". Sur ce problème de subprimes justement, il est important de relever quelque chose qui est caractéristique de ce que Alexandra qualifie à juste titre de collusion d'intérêts.
En effet, en 2007, rapporte t-elle, John Paulson baptisé "sultan des subprimes" a fait réaliser à son fonds Paulson and Co, un bénéfice de 3 milliards de dollars en créant des fonds spéculatifs couvrant le risque défaillance des crédits hypothécaires". Mais c'est ce Paulson que Georges Bush nommera comme Secrétaire au Trésor l'équivalent du ministre des Finances des Etats-Unis. C'est ce que j'appelais par ailleurs, "porter le business au cœur du pouvoir politique" Dès lors, on eut penser que le rôle de Paulson n'était pas de contribuer en tant que patron du Trésor à une meilleure régulation de la plus puissante économie du monde mais plutôt à son dérèglement et "l'affaiblissement de certains standards éthiques" en vue de favoriser les milieux financiers dont il est lui-même issu.
De nombreuses mesures dérèglement ont ainsi été prises aussi bien aux Etats-Unis qu'au niveau de l'union européenne qui ont contribué à faire entrer les loups dans la bergerie. Dans son article, Alexandra en dégage trois principaux qui ont "neutralisés les discours clairvoyants et les mises en garde prudentes des cassandre".
Le premier, c'est "la révocation en 1999 du Glass Seagall Banking Act de 1933". C'était sous Clinton. Cette révocation a "mis fin à la séparation étanche qui prévalait jusqu'alors entre les banques d'investissement et les banques commerciales. Ce qui a induit une collusion d'intérêt entre les agences de notation et les banques d'investissement". Ainsi, poursuit Alexandra, "les analystes, bien que censés conseiller les investisseurs des banques commerciales, ont vu leur rémunération dépendre de leur contribution au chiffre d'affaire des banques d'investissement et ont ainsi été amenés à conseiller l'achat de titres émis par la banque d'investissement même si les anticipations de résultat n'étaient pas forcément bonnes".
Le deuxième c'est le passage des accords de Bale I aux accords de Bale II. Ainsi, Alexandra révèle que les accords de Bale II, élaborés en 2004 t applicables depuis 2007 "ont favorisé la titrisation des crédits bancaires". Il faut bien relever que c'est pendant cette période que le G8 faisait une démonstration de puissance dans ses fameuses réunions annuelles. Ces accords viennent "modifier les normes prudentielles des banques et remplacent le ratio Cooke par le ratio Mac Donough. Le ratio Cooke imposait aux banques d'avoir des fonds propres supérieurs à 8% des risques de crédits qu'elles engageaient. Le ratio Mac Donough modifie cette exigence en intégrant trois risques supplémentaires : les risques de crédits, les risques opérationnels (risques de pertes liées à des systèmes ou des personnes inadéquates ou défaillantes) et les risques de marché. Ainsi, si les cours de bourse chutent, le ratio Mac Donough exige que les banques réduisent leurs stocks d'actifs risques, aggravant ainsi la baisse de la valeur de marché de ces actifs". Et Alexandra de conclure que, "de prêteur, le banquier est devenu un intermédiaire financier, c'est-à-dire qu'au lieu d'évaluer le risque, il s'est contenté de le transférer".

Que de curiosités!
L'union européenne n'est pas en reste dans cette vague de dérèglement des économies et c'es elle d'ailleurs qui nous offre le troisième cas de mesures. Ainsi, "dès 2006, les nouvelles normes comptables IFRS oblige à valoriser dans la comptabilité des entreprises les actifs non pas à leur coût historique d'acquisition mais à leur valeur de marché. Ainsi, toute baisse des cours se traduit immédiatement par de fortes dépréciations du bilan des entreprises".
Nous pouvons constater que toutes ces mesures contribuent de façon flagrante à une financiarisation à outrance de l'économie mondiale. On parlerait mieux d'une "casinoïsation" de l'économie tant tout aujourd'hui est connecté à la bourse. C'est ce que Alexandra traduit en ces termes : "la politique financière devient fortement dépendante des fluctuations quotidiennes des cours (de la bourse) et l'horizon temporel des décisions se raccourcit fortement".
Tous ces dérèglements, ajouté à la défaillance des principaux acteurs de la régulaton financière "que sont les autorités de tutelles comme la SEC (Securities and Exchange commission) aux Etats-Unis ou l'Autorité des marchés financiers en France", ont ouvert grandement la porte de la Finance à des hommes d'affaire à l'honnêteté douteuse, en même temps qu'ils bandaient les yeux aux autorités en charge de la conduite des politiques financières. C'est ainsi que Bernard Madoff, considéré aujourd'hui comme le plus célèbre escroc de tous els temps, a fait irruption dans la finance avec le résultat qu'on connaît.
Et pourtant ce n'est pas la clairvoyance des cassandre qui a fait défaut. Alexandra rapporte en effet, que "dès 2005, Harry Markopolos envoie à la SEC une note de dix neuf pages intitulée "le plus gros hedge fund du monde est une escroquerie?" Il recense 29 drapeaux rouges permettant de douter de l'honnêteté de Madoff : absence de hedge fund, rémunérations uniquement sur le trading, volume de fonds gérés par rapport à la taille réduite du marché où il prétend intervenir, performances peu plausibles, liquidation des positions en fin d'année, détention interne des titres, cabinet comptable obscur, proximité de la famille Madoff avec les autorités du Nasdaq (sa nièce, chargée du respect des règles chez Madoff Investment Securities LLC, avait épousé un ancien agent du département de la répression de la SEC".
Même les patrons de banques si souvent prudents, avaient presque tous cédé à ce que Alexandra appelle "les comportements moutonniers". Et ceci, pense t-elle, "parce que la réalisation de gains monétaires trop importants génère un excès de sûreté de soi et un sentiment d'invulnérabilité". Désormais en effet, trop sûr d'eux, "la confiance de leur pairs leur était plus importante que celle qui doit normalement irriguer verticalement une entreprise". Mais l'une des causes que la pudeur empêche parfois d'évoquer est la chasse aux gains personnels qui fait que le patron de banque privilégie la ficelle que lui donne son collègue pour entretenir son illusion, qu'une note bien sentie de son conseiller qui finalement le déprime. Les stocks options et les parapluies dorés expliquent aussi cette tendance à la prise effrénée de risque et donc à la mise à l'écart des conseils des experts.

Les responsabilités
Ces éléments de preuve dégagent au moins trois certitudes :
- Il y a bien eu des collusions d'intérêts au cœur des pouvoirs des Etats. Ceci s'explique par le fait que, du fait de la réalismologie, les acteurs politiques, travaillant déjà sous le couvert de certains hommes d'affaires qui les ont pris en otage notamment en finançant leurs campagnes, ont finalement consenti à ouvrir la porte du pouvoir à ces derniers. D'où pour le cas des Etats-Unis, l'arrivée de John Paulson au ministère des Finances, l'arrivée de Dick Chenney qui a quitté la société d'ingénierie civile Halliburton spécialisée dans l'industrie pétrolière pour devenir vice président de Etats-Unis. Il faut d'ailleurs voir la destination de certains anciens présidents membres du G8 pour comprendre le vrai sens de la collusion : Bill Clinton engrange tellement d'argent à faire de conférence que le département d'Etat veut enquêter sur l'identité de ses donateurs. Tony Blair s'est fait recruter comme conseiller à temps partiel dans le prestigieux cabinet JP Morgan pour un salaire mensuel de 80 000 euros. D'après le journal Marianne, l'ancien chancelier allemand "Gherard Schröder n’a fait que rejoindre la société de gestion de pipe-line (Northern European Gas Pipeline Compagny) que sa fonction de Chancelier lui avait permis de favoriser" et ce ci pour un salaire de 250 000 euros l'an. Georges Bush s'apprête à se lancer dans un cycle de conférence qui lui permettra de renforcer son bas de laine.
- Il y a eu non pas des défaillances mais une volonté affirmée parfois de pousser l'économie mondiale à la dérive. Cela se voit par la violation flagrante de certaines règles élémentaires de la Finance. Mais cela se voit surtout par la marginalisation et la non prise en compte délibérée de l'opinion de ceux qui pourtant sont payés pour prévenir les dérives. Sans verser dans la théorie des complots, on peut penser que des dirigeants se sont réunis pour programmer la débâcle de la Finance mondiale.
- Il faut simplement remarquer que les dix ans pendant lesquelles la crise a mijoté tranquillement avant de nous exploser à la face, correspondant aux années où le G8 excellait dans la démonstration de force avec des sommets spectaculaires. A Gleaneagles en Angleterre en 2005 par exemple, ils avaient invité des artistes à venir chanter leurs louanges à l'instar de certains rois obscurantistes connus dans l'antiquité. Ces chansons de louanges se sont avérées n'être que des chants de cygne qui annonçait la fin du G8 mais le début des souffrances.
Maintenant que les responsabilités sont établies, et me permettant de prendre la posture de procureur, je peux prononcer le réquisitoire suivant :
Attendu qu'en se faisant discrètement adouber par les milieux d'affaires et en se faisant élire par le peuple floué par toute sorte de manipulation, les dirigeants réalismologistes du G8, ont contacté une hypothèque sur le pouvoir qui est la propriété du peuple souverain.
Attendu qu'en invitant certains hommes d'affaires au cœur du pouvoir et en demandant aux autres d'occuper l'anti-chambre du pouvoir, les dirigeants réalismologistes du G8 ont trahi la mission que le peuple souverain a placé en eux et ont validé l'assertion selon laquelle "l'Etat n'est en fait qu'un appendice des affaires privées".
Attendu que la déréglementation de l'économie et la crise qui s'en est suivi fera des millions de morts de par le monde.
Attendu que les dirigeants réalismologistes du G8 ont agi essentiellement pour la promotion de leurs intérêts personnels et ceux de leurs proches.
Requiert ce qui suit :
- Que les dirigeants réalismologistes du G8; convaincus de destruction de l'économie mondiale, soient néanmoins laissés face à leur conscience. Toutefois, une condamnation morale doit être faite contre eux au cours du sommet du G20.
- Que l'influence des membres du G8 soit amoindrie au profit des pays émergents au sein des institutions de la régulation de l'économie mondiale que sont le FMI et la Banque Mondiale. Ces pays ayant la charge d'y restaurer les standards éthiques détruits par le G8
- Que l'Afrique ne soit plus utilisée comme l'étalon de la pauvreté et de toutes les calamités dans le monde.
Bien sûr nous étions là dans le cadre d'un procès symbolique. Mais entre le symbole et la réalité il y a parfois que des limites que nous voulons nous-mêmes mettre.


Etienne de Tayo
Promoteur Afrique Intègre
http://www.edetayo.blogspot.com/

Auteur de l'ouvrage : "pour la Dignité de l'Afrique, laissez-nous crever" Ed : Menaibuc Coll. : Afrique Intègre

jeudi 2 avril 2009

LE G20 : UN SOMMET PEUT EN CACHER UN AUTRE


Le sommet du G20 qui vient de s'achever à Londres a pris des mesures fermes pour la régulation et la relance de l'économie mondiale. Mais c'est le sommet entre le président américain Barack Obama et le président Chinois tient la vedette.


Au plan de la régulation, il est question de "faire la liste des paradis fiscaux, les classer par rapport au risque qu'ils peuvent représenter et sanctionner les pays qui ne coopèrent pas"; "les hedges fund seront désormais règlementés et soumis à une immatriculation obligatoire". Enfin, il sera mis fin au secret bancaire". Au niveau de la relance, "un programme de 1 100 milliards de dollars destiné à soutenir le crédit, la croissance et l'emploi; 5 000 milliards de dollars à injecter dans l'économie mondiale d'ici 2010; le triplement à 750 milliards de dollars les ressources du FMI qui sera amené à vendre ses réserves d'or; enfin 250 milliards de dollars pour soutenir le commerce mondial".
Mais ce communiqué final que le président français Nicolas Sarkozy fête presque au champagne, cache à peine un autre communiqué signé par le secrétaire au Trésor américain Timothy Geithner et la secrétaire d'Etat Hillary Clinton à l'issue de la rencontre entre le président Barack Obama et le président Chinois Hu Jintao.
Dans ce communiqué, il est révélé en substance que "les Etats-Unis et la Chine se réuniront une fois par an pour des discussions sur des questions stratégiques et économiques, alternativement dans l'une ou l'autre capitale". Le président Barack Obama a donc désigné le secrétaire au Trésor Gethner et la secrétaire d'Etat Clinton pour assurer ces rencontres. Dans le communiqué d'ailleurs, les deux responsables américains "se sont dits impatients de travailler avec leurs homologues chinois, le conseiller d'Etat chinois Dai Bingguo et le vice premier ministre Wang Qishan". Toujours selon le communiqué, "Obama et Hu sont convenus de coopérer à des mesures de stimulation de la croissance mondiale et au renforcement du système financier". Le communiqué poursuit en disant "qu'ils sont déterminés à résister au protectionnisme et à assurer des relations commerciales solides et stables entre les Etats-Unis et la Chine".
A la lecture de ce communiqué, on peut dire, sans risque de se tromper qu'à Londres, un sommet a caché un autre. Et que le sommet le plus important n'est pas toujours celui le plus couru car comme on sait, en politique et encore plus en diplomatie, l'essentiel est dans le détail et non dans la mise en scène qui ne lui sert finalement que d'habillage.
La sortie fracassante du président français Nicolas Sarkozy, quelques heures avant l'ouverture du sommet disant que s'il n'était pas satisfait de la conduite des travaux du G20, il claquerait la porte du sommet, n'est pas aussi naïve et aussi anodine que certains présentateurs veulent la faire passer. Son propos peut être comparé à un échappement de vapeur se dégageant d'une marmite en ébullition. Même s'il a donné l'impression de revenir sur son propos, il sait que le massage est passé et que ses destinataires l'ont bien appréhendé. De quoi s'agit-il?
Il s'agit que le monde aujourd'hui est à la croisée des chemins. Et personne, même parmi les cassandre les plus futés ne peut dire ce que demain sera fait au plan de la géopolitique mondiale. Confronté à la crise économique dont on ne mesure pas encore l'ampleur et les dégâts futurs, confronté à la montée fulgurante du groupe des pays émergents, confronté au déclin, bien sûr encore masqué, de certains pays jadis présentés comme étant les plus puissants du monde, confronté au recul de l'unipolarisation du monde que les Etats-Unis ont tenté d'imposer au reste du monde sans succès, confronté au réchauffement climatique, le monde doute et la suspicion monte parmi les dirigeants. La suspicion est d'autant plus grande qu'il est temps de procéder à une nouvelle redistribution des cartes.
Cela coule de source que le G20 est un groupe absolument pléthorique pour conduire harmonieusement le destin du monde. Rien n'indique qu'il ne sombrera pas dans les mêmes travers que le G8 défunt. Certains experts proposent donc la création au sein même du G20, d'un noyau dur autour duquel, les autres pays viendront se greffer. Ce noyau là aura la charge de convoquer les sommets et de proposer des solutions et des vues par rapport à la marche du monde. Et les autres n'auront qu'à les valider.

Dis moi ce que tu pèses
Il se trouve que dans la constitution de ce noyau dur une alliance que d'aucuns qualifient de contre nature est en train de s'opérer. En effet, les Etats-Unis, se sentirait plus proche de la Chine pour la constitution de ce noyau dur que de l'Europe par exemple. C'est pourquoi une rumeur a circulé révélant que le G20 risquerait se transformer en G2 c'est à dire le couple Etats-Unis – Chine. Et les autres ne seront là que pour de la figuration. Le Etats-Unis comptant d'avance en Europe sur leur allié naturel qu'est la Grande Bretagne, ce qui représente d'ailleurs pour eux l'Europe utile.
Dans cette nouvelle redistribution des cartes en vue d'une nouvelle géopolitique mondiale, les experts du coté de Washington ne veulent plus prendre en compte l'Europe historique, l'Europe coloniale, celle qui avait présenté les richesses de ses colonies pour obtenir une place de choix au sein du concert des nations. Les Experts ne veulent plus s'enfermer dans le sentimentalisme primaire qui voudrait que les Etats-Unis s'allient automatiquement au vieux continent d'où la majorité de ses habitants sont originaires.
Ils veulent vivre la réalité et le présent. Alors, ils demandent à l'Europe de révéler son véritable poids aujourd'hui, exception faite des colonies qui n'en sont plus ayant depuis acquis leurs indépendances. Or, il se trouve que de façon intrinsèque, l'Europe ne pèse plus grand-chose aujourd'hui. Son peuple a vieilli. Sa jeunesse doute et est inquiète. Ses méthodes sont déclassées. Ses anciennes colonies, non seulement ne répondent plus d'elle mais veulent lui faire payer des réparations diverses. Aux yeux de beaucoup d'experts à Washington, cette Europe là, en s'élargissant indéfiniment compromet elle-même sa propre performance. Bref, ils disent que l'avenir ce n'est pas l'Europe.
C'est donc mis au parfum de cette nouvelle configuration du monde qui est entrain de se dessiner, que Nicolas Sarkozy, délaissant son atlantisme réel ou supposé, a voulu se souder à la chancelière allemande Angela Merkel pour tenter de reconstruire l'imaginaire de ses pairs européens par rapport au couple franco-allemand mythique inauguré par Français Mitterrand et Helmut Kolh, comme le moteur d'une Europe éternelle. Il a voulu aussi mesurer la porter d'une menace française mais subrepticement européenne de claquer la porte du G20.
C'est vrai qu'au moins au niveau du spectacle et de l'événementiel, un tel acte pourrait avoir une portée symbolique inestimable parce que l'Europe, malgré ses difficultés, continue d'entretenir l'illusion d'une puissance qui compte dans le monde. Et dans ce jeu, elle est favorisée par un imaginaire construit depuis des siècles, d'une civilisation étendard, c'est-à-dire une sorte de norme sur laquelle les autres viendront copier.
Mais, au vu de la réalismologie qui semble être le filtre à travers lequel beaucoup de personnes voient le monde aujourd'hui, l'Europe imaginaire et même mythique risque avoir beaucoup de peine à tenir.
Donc au G20, on a discuté bien sûr de la moralisation des affaires pour sauver le capitalisme dans le monde et permettre de rester une idéologie dominante, mais on a surtout discuté de qui gouvernera le monde. Peut être verra t-on plus clair au prochain sommet pévu à New York en septembre prochain?

Etienne de Tayo
Afrique Intègre
http://www.edetayo.blogspot.com/
Listes des paradis fiscaux établies par l’OCDE à la demande du G-20

Publiée par l’OCDE à la demande du G-20, nous vous transmettons ici la liste « des paradis fiscaux qui ne sont pas en conformité avec les règles mondiales d’échange d’informations fiscales ».
Trois listes des paradis fiscaux établis par l’OCDE
1. Liste noire
Etats ou territoire qui ne se sont pas engagés à respecter les standards internationaux)
-Costa Rica - Malaisie (Labuan) - Philippines - Uruguay
2.Liste grise :
États ou territoires qui se sont engagés à respecter les standards internationaux mais ont à ce jour signés moins de douze accords
Liste gris foncée (paradis fiscaux déjà identifiés en 2000 par l’Ocde) :
Andorre - Anguilla Antigua - Barabade - Aruba - Bahamas - Bahrein - Belize - les Bermudes - les iles vierges anglaises - les iles Cayman - les iles Cook - la Dominique - Gibraltar - Grenade - Liberia - le Liechtenstein - les Iles marshall - Monaco - Montserrat - Nauru - les Antilles néérlandaises - Niue - Panama - St Kitts and Nevis - Sainte Lucie - Saint Vincent et Grenadine - Samoa - San Marin - les iles Turks and Caicos - Vanuatu
Liste gris clair (autres centres financiers)
Autriche - Belgique - Brunei - Chili - Guatemala - Luxembourg - Singapour - Suisse
3. Liste blanche :
Etats ou territoires qui ont mis en œuvre des standards internationaux en signant au moins 12 accords conformes à ces standards
Argentine - Australie Barbades - Canada - Chine(*) - Chypre - République tchèque - Danemark - Finlande - France - Allemagne - Grèce - Guernesey - Hongrie - Islande - Irlande ile de mans Italie - Japon - Jersey - Corée - Malte - ile Maurice - Mexique - Hollande - Nouvelle Zélande - Norvège - Pologne Portugal - Russie - les Seychelles - la Slovaquie - Afrique du sud - l’Espagne - la Suède - la Turquie - les Emirats arabes unis - royaume uni - Etats-Unis - les iles Vierge.
(*) Macao et Hong Kong territoires chinois, ont pris l’engagement en 2009 de se conformer aux standards internationaux, en conséquence ces deux territoires ne sont plus mentionnés dans la liste grise
Source : L'International Magazine