En 1956, l’Argentine est étranglée par les dettes. Elle demande à connaître ses créanciers. Le ministre français des Finances s’étant proposé comme intermédiaire, la première réunion se tint à Paris le 16 mai de la même année. Le Club de Paris était ainsi né dans l’informel. Aujourd’hui, plus de 50 ans après sa création, ce groupe informel qui se présente comme une "non institution" et qui tient des sessions mensuelles, n’a ni existence légale ni statuts. "Son secrétaire général a dit un jour que quand les délégués des différents Etats étaient sur le chemin de retour, le Club de Paris cessait d’exister". Et pourtant, le Club de Paris trône sur le toit du monde et n’hésite pas, quand il le faut, à faire sentir le mors aux pays en développement qui traînent les pattes par rapport au remboursement des dettes.
Le Club de Paris est formé par 19 Etats créanciers dont les membres du G8 auxquels il faut ajouter : Australie, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, Irlande, Norvège, Pays- Bas, Suède, Suisse. Par l’objectif qu’il s’est fixé, ce Club des créanciers montre qu’il n’est ni une instance de négociation encore moins un groupe philanthropique mais plutôt une agence de recouvrement forcé et une trappe sur laquelle viennent échouer tous les pays pauvres très endettés et en difficulté de remboursement : "Les créanciers du Club de Paris souhaitent recouvrer au maximum leurs créances. Ainsi, ils demandent le paiement immédiat d’un montant aussi élevé que possible. Les montants qui ne peuvent pas être payés sont rééchelonnés dans des conditions qui équilibrent les paiements futurs et dans l’objectif de minimiser la chance que le débiteur doive retourner dans le futur devant les créanciers du Club de Paris avec une requête additionnelle".
Dans sa démarche, le Club de Paris qui pourtant se situe dans la continuité de la politique de gestion de la dette du FMI et de la Banque Mondiale, se moque parfaitement de l’état de santé économique des Etats débiteurs : "Il ne s’agit pas de libérer les capacités de financement du développement de ces pays, ni de les soulager du fardeau insupportable de la dette mais de leur faire payer au maximum de leurs capacités. Desserrer l’étau de la dette juste assez pour qu’ils soient en mesure de rembourser". Les chiffres sont d’ailleurs édifiants à cet effet. De 7 à 10 pays endettés auditionnés de 1997 et 1999, le Club de Paris est passé à 20 pays en 2000 et à 18 pays en 2001, "ce qui est un signe inquiétant de l’inefficacité des mesures imposées".
Le 14 juin 2006, le Club de Paris a organisé à Paris justement, une conférence à l’occasion de son cinquantième anniversaire. Ce forum qui a réuni environ 400 participants a permis des échanges fructueux mais rien n’a été dit sur le caractère informel de ce groupe qui pourtant est devenu un acteur majeur de la coopération et le développement dans le monde.
En 1975, au lendemain du conflit Israélo arabe, une crise pétrolière sans précédent menace le monde. Valery Giscard d’Estaing, qui vient d’être élu président en France, prend l’initiative de réunir de façon tout à fait informelle à Rambouillet, non loin de Paris, les chefs d’Etats et de gouvernement de l’Allemagne, Etats Unis, Royaume Uni, Italie et Japon en vue de trouver une réponse commune à cette menace. Le G7 qui deviendra G8 avec l’admission de la Russie venait ainsi de voir le jour au terme d’une anecdote. Il est constitué de nations industrielles situées pour la plupart à l’hémisphère nord. De proche en proche, et profitant de l’apathie des institutions chargées de la régulation économique dans le monde, et de la montée du nombre d’Etats clochardisés dans le monde, le G8 - qui forme en fait la nervure central de l’ossature du Club de Paris - a pris le pouvoir et domine littéralement le monde. Ses sommets, particulièrement courus ces derniers temps, accouche souvent des décisions sensés s’imposer sur l’ensemble de la planète au travers du système international qu’il a fini par phagocyter.
En 1996, réunis à Lyon, le G7 décide de lancer l’initiative Pays Pauvres Très Endettés (Ppte) afin de rendre soutenable la dette de pays en situation très difficile. Aussitôt, le concept est adopté par l’ensemble du système financier et monétaire mondial. Dans la gestion de l’industrie de la pauvreté, le G8 est devenu le maître d’ouvrage tandis que les institutions de Brettons Wood, le FMI et la Banque Mondiale, et les autres instruments du système des Nations Unies sont réduits au simple rôle de maître d’oeuvre. Et pourtant, comme le Club de Paris, le G8 n’a aucune existence juridique et comme lui, se complait dans l’informel.
Dans la répartition du travail qu’ils se sont donnée, les deux institutions ci-dessus tendent à se rendre indispensables et incontournables pour les pays en développement. Le Club de Paris, sous les apparences de session de "négociation", traque, de façon impitoyable, les débiteurs constitués essentiellement des pays pauvres. De son coté, le G8 s’évertue à tenir un discours humaniste et à faire des promesses toujours plus mirobolantes les unes que les autres, en vue du développement de ces mêmes pays. Le Club de Pais et le G8 agissent ainsi comme deux bestioles dont l’un est chargé de mordre sa victime et l’autre, de souffler sur la blessure, question d’atténuer la douleur.
Ce qui nous a interpellé dans ce travail, ce n’est nullement la richesse des riches qui en principe ne devrait gêner personne, sauf les jaloux. C’est :
d’un coté, la roublardise insupportable des dirigeants du G8 qui oublient souvent leurs promesses dès qu’ils les ont annoncées au cours de leur sommet et qu’ils ont pris soin de les faire relayer par les médias ;
et d’un autre coté, la relative naïveté, pour ne pas dire plus, de certains dirigeants africains qui pensent que le G8, présenté comme le groupe des "puissants du monde" - qui est du reste fier et jaloux de sa puissance - effacera sans condition la dette des pays africains et fournira ensuite des moyens nécessaires au financement des projets devant favoriser le décollage économique du continent africains. Ce qui serait trop beau dans un monde dominé par l’indifférence, l’égoïsme et le cynisme. Dans ce travail, nous affirmons que cette politique de mendicité fait courir un péril grave à la dignité et à la fierté de l’Afrique et des Africains. Nous avons pensé que, sans vouloir s’enfermer dans une sorte d’autarcie qui n’est plus possible dans ce monde mondialisé, l’Afrique doit, pour son développement, tourner le dos à tous les "marchands des promesses trompeuses". Elle doit compter d’abord sur elle-même et sur toutes les bonnes volontés que recèle heureusement la coopération citoyenne. Elle doit ensuite :
Abandonner sans délai, la culture des produits agricoles qu’elle ne transforme, ni ne consomme, ni même ne maîtrise la fixation des prix sur le marché mondial. Elle doit ainsi tirer les leçons de la faillite de ces produits d’exportation et revenir aux cultures vivrières pour nourrir ses fils et filles ;
Trouver les moyens de fructifier plus que par le passé les transferts des migrants qui dans certains cas, doublent l’aide publique au développement dont les effets négatifs sur la fierté et la dignité de l’Afrique sont incalculables ;
Mobiliser la diaspora en vue de tirer le meilleur de sa contribution pour le développement du continent. Bien entendu, l’approche proposée dans ce travail marque la rupture par rapport au passé. Et tout processus de rupture autoentretenu nécessite la transformation de l’Homme, d’abord pour le couper de la nostalgie et l’installer dans la perspective des nouveaux enjeux.
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1 commentaire:
A condition que les Africains pour qui cet ouvrage est rédigé prennent réellement conscience et prennent aussi leur destin en main.
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