lundi 11 avril 2022

 


IDEE

EXPOSITION : SUR LA ROUTE DES CHEFFERIES OU SUR LA ROUTE DU QUAI BRANLY ?

De ce mardi 5 avril  au 17 juillet 2022, le Musée du Quai Branly à Paris sera paré aux couleurs du Cameroun. Ceci, à la faveur d’une « exposition consacrée à l’art des communautés établies sur les hauts plateaux des Grassfields, à l’Ouest du Cameroun », d’après une annonce du site du Musée du Quai Branly. Porté par l’Association « Routes des chefferies » et dit-on « dans une démarche collective de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine traditionnel »,  cette exposition « aborde la culture des communautés  et la préservation d’un patrimoine unique, historique et vivant » et constitue « un voyage au cœur des us et coutumes des peuples du Cameroun dans toute leur diversité ». 

Sous le thème suggestif « Sur la routes des chefferies du Cameroun : du visible à l’invisible », l’exposition déploie « près de 300 œuvres dont 260 trésors conservés par plusieurs chefs et lignages familiaux ». Pour la réussite de l’exposition, la bande d’annonce nous informe que « 24 chefs ont prêté des œuvres et une trentaine ont participé à la conception de l’exposition ».  Les œuvres exposés comprennent : architecture monumentale, forge, créations perlées, sculpture sur bois, production textile, masques, bijoux, statues ornementales et rituelles, totems, coiffes chatoyantes, tenues traditionnelles, danses traditionnelles.

Toujours dans la note de présentation sur le site du Musée du Quai Branly, nous apprenons qu’il s’agit « d’un patrimoine unique et historique, précieusement gardé depuis des siècles par les chefs traditionnels. Personnages quasi-divins, ces derniers en sont les principaux dépositaires, garants à la fois de la tradition et du lien entre le monde des ancêtres et celui des vivants ». Un dithyrambe et une couronne d’éloges tissés en direction  de ceux qui seront les premiers surpris. Et pour cause. Pendant les trois mois que durera l’exposition, et d’un point de vue purement marketing, des centaines de milliers de touristes venus du monde d’entiers prendront connaissance de la richesse du patrimoine culturel africain et deviendront certainement des touristes potentiels pour le berceau de l’humanité. Cela s’appellerait se montrer pour mieux se vendre demain.

Voilà qui est donc peut-être bien fait pour le tourisme futur en direction de l’Afrique, pour la rencontre des civilisations et pour le dialogue des cultures compris comme « la résultante d’une articulation positive des différences et des ressemblances  entre partenaires autonomes et actifs, partageant une même communauté de destin ». Mais personnellement, l’exposition du Musée du Quai Branly me pose au moins deux problèmes qui viennent heurter violemment ma fibre panafricaniste : il y a d’abord un premier problème qui est celui du contexte de sa tenue. Un contexte maqué par le mouvement inverse de la restitution des objets d’art pillés par les colons négriers et les Etats  esclavagistes et colonialistes. Il y a ensuite le problème du sens du voyage des hommes et des objets quand ont sait que pour cette exposition, certains chefs traditionnels du Cameroun et plus précisément de la région de l’Ouest ont délaissé leurs palais pour embarquer dans un avion, direction Paris, les objets royaux en soute. Cela me pose un réel problème par rapport à la reconquête de la dignité perdue de l’Afrique du fait de l’esclavage et de la colonisation.

Les Trésors d’Abomey sont de retour

Le 27 octobre 2021, le Président français a présidé au Musée du Quai Banly, une cérémonie de restitution officielle par la France de 26 pièces du Trésor royal d’Abomey. Emmanuel Macron tenait ainsi parole suite au vote par le parlement français, le 24 décembre 2020 autorisant la France à rendre ce butin de guerre. En effet, les 26 œuvres d’art du Benin, prises de guerre du général français Dodds,  issus du pillage des Trésors d’Abomey et présents en France depuis 130 ans ont été restituées après des années de polémiques. Parmi ces objets, il y a : « la statue royale dite Bochio, mi homme, mi requin du roi Béhanzin, le dernier roi d’Abomey capturé par les Français en 1894 et envoyé de force en exil en Martinique ». Mais nous avons aussi parmi ces objets : « des trônes royaux d’Abomey, des sculptures anthropomorphes représentant les rois Abomey ». Ces objets rejoindront à terme le Musée d’Abomey où ils reposeront pour l’éternité et certainement en paix. Pour Epiphane Basile Migan, Béninois résidant en France, il s’agit « des pièces  uniques au monde, d’une valeur inestimable »

Cette restitution découle d’une revendication faite par le gouvernement du Benin en 2016 et d’une promesse d’Emmanuel Macron lors de l’élection présidentielle de 2017. Pour Emmanuel Macron, il s’agit de « permettre aux Africains de dire leur part du monde et aux regards français sur le continent africain de changer ». Mais pour nous, cela n’a pas d’importance puisque ce n’est pas dans le regard des français que l’Afrique existe et se développe et il n’est point question de croire que les Africains diront Merci pour la restitution des biens qui leur avaient été volés. Il est question de remettre les choses à l’endroit, pas seulement pour la France mais tous les pays coloniaux qui avaient pillé, et continuent malheureusement de piller le patrimoine culturel de l’Afrique.

Selon certains spécialistes, « près de 90% du patrimoine africain se trouverait encore aujourd’hui en dehors du continent ». Et je suis convaincu que l’Afrique ne retrouvera son équilibre cosmogonique et son émergence politico-économique qu’à partir du moment où ce Trésor patrimonial, dans son entièreté, reposera paisiblement sur le continent et dans les lieux d’où il avait été arraché. L’Union africaine devrait inscrire dans son agenda et comme priorité, la restitution du patrimoine pillé de l’Afrique et déployer une véritable diplomatie culturelle pour que notre continent retrouve son âme. Il s’agit à mon sens d’une condition sine qua non de son développement.

Maintenant que le contexte est décrit, revenons  à l’exposition de la route des chefferies du Musée du Quai Branly pour mesurer son anachronisme par rapport au sens de l’histoire ou tout simplement par rapport à la marche des choses dans le monde aujourd’hui. Le sens de l’histoire c’est celui de la restitution et non d’une collaboration contre nature. Il faut savoir qu’à coté du Benin, plusieurs autres pays africains ont déjà engagé des démarches en vue de la restitution des objets volés et certains avaient d’ailleurs trouvé un début de satisfaction. Il en est ainsi du Sénégal qui s’est vu restituer « le sabre et le fourreau d’El Hadj Omar Tall ». De même, selon Stéphane Renault du journal « The Art paper », « des échanges sont en cours  avec la Côte d’Ivoire en vue d’une future restitution du « Tambour parleur » Djidji Ayokwe des Ebrié, confisqué en 1916 par les colons français ».

« Au moment où on attend que d’autres pays qui détiennent des pièces africaines emboitent le pas à la France pour les restituer », comme le dit si bien Calixte Biah, conservateur du Musée d’histoire de Ouidah, l’exposition de la route des chefferies peut sonner comme un soutien apporté « aux tenants du marché des arts premiers qui en France, voient en la restitution une épée de Damoclès et redoutent l’ouverture de la boite à pandore ». Il faut d’ailleurs rappeler que Jacques Chirac, créateur du Musée du Quai Branly avait toujours freiné de mille fers et on lui prête cette boutade qu’il utilisait pour répondre à ceux qui lui demandaient de tenir ses promesses de restitution. Il disait : « Les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent ». C’est dire si en France le courant des anti-restitution doit être fort. Et c’est cela aussi le contexte.

Le sens de l’histoire

Il se passe qu’au 21e siècle, c’est à dire plusieurs siècles après que les colons avaient pillé nos objets d’art au besoin en tuant le légitime propriétaire et en emportant le butin dans les cales de leurs bateaux et au moment où les démarches sont faites par plusieurs pays pour les faire rentrer au bercail, des chefs traditionnels, invités par le projet « route des chefferies » et les organisateurs de l’exposition de Paris,   sans contrainte aucune, ont embarqué dans un avion avec des objets d’art en soute pour aller s’exposer là où les autres objets pillés sont confisqués. En France, ils ont confié ces objets aux responsables du Musée du Quai Branly qui les mettront en vitrine pendant 4 mois. C'est-à-dire qu’au lieu de voir les touristes demain sur les routes des chefferies avec les retombées financières conséquentes pour nos économies, ont voit plutôt les chefs traditionnels sur la route du Quai Branly avec des risques de perte de prestige certains. Ce qui a inspiré ce titre au site kpjevents.com : « Patrimoine : les chefs sur la route du Musée du Quai Branly ».

Vu au  premier degré et certainement pour les promoteurs du projet de la route des chefferies et pour les organisateurs de l’exposition de Paris, il s’agit d’une action marketing destinée à vendre l’image de l’Afrique à travers son riche patrimoine culturel et rituel. Et ils pensent que la place de Paris offre une plus grande visibilité que l’arrière pays africain. Le faisant, ils sont en retard au moins d’un palier par rapport à l’évolution de l’Afrique et à la place qu’elle occupe désormais dans le jeu des puissances. En effet, depuis quelques années, les bouleversements géopolitiques et les luttes de puissance ont placé l’Afrique au centre de tous les enjeux. Ce n’est plus un slogan, il faut reconnaître que l’Afrique est le continent de l’avenir et sera bientôt le pôle touristique majeur du monde.

Au Cameroun et principalement à l’Ouest, le programme « Route des chefferies » a permis à certaines chefferies pillées et brûlées par le passé par les colons de reconstituer une partie de leur patrimoine culturel et ancestral. A l’Ouest et grâce à ce programme, plusieurs chefferies ont érigé des cases patrimoniales et même des Musées dont les plus emblématiques sont à Bapa, Bana, Batoufam ou encore Foto. Elles viennent compléter le majestueux Musée de Foumban. Dans la ville de Dschang et toujours dans le cadre de la « Route des chefferies », il a été érigé un Musée de civilisations qui se mire chaque jour dans les eaux du lac municipal de la ville.  Plusieurs objets d’art de la région et même d’ailleurs y sont exposés et sauvegardés. L’idéal serait qu’à terme, chaque chefferie du Cameroun puisse disposer d’un Musée où les touristes mais les enfants du terroir viendront se ressourcer.

Après avoir exposé ces réalisations louables, nous pouvons relever qu’il y a dans la démarche des promoteurs du projet de la « Route des chefferies » au moins deux écueils : Il y a en effet une erreur d’appréciation d’un point de vue de la  géopolitique et même de la géostratégie par rapport au destin de l’Afrique. Il y a ensuite une grande contradiction dans la démarche des organisateurs de l’exposition qui, en exposant l’Afrique  à Paris alors qu’ils sont à la base  de la renaissance des chefferies traditionnelles à l’Ouest par exemple, foulent aux pieds le principe aristotélicien du tiers exclu. En effet, on ne peut pas être en train de travailler à la restauration, à la consolidation et à la promotion des chefferies traditionnelles sur place  pour en faire des lieux touristiques rayonnant sur le monde entier et valider aussi la proposition contraire visant à transporter ces chefferies et leurs contenus sur la place de Paris parce que c’est uniquement là bas qu’elles peuvent être visibles et valorisées. Alors, pendant qu’on y est, pourquoi ne pas délocaliser en France ou aux Etats-Unis, pour plus de visibilité, les sites touristiques ou tout simplement cette nature qui fait la beauté du continent.

En guise de synthèse à cette réflexion, nous dirons que nous validons totalement la rencontre des civilisations et le dialogue des cultures. Mais il ne  faut pas y aller en simple touriste affichant un angélisme déroutant. Il faut être capable de comprendre tous les paramètres du jeu, de même que les enjeux et agir en conséquence. Ce que nous, pauvre Africain, ignorons souvent c’est que l’homme occidental, à savoir le promoteur de l’esclavage et de la colonisation, est constamment dans un jeu conflictogène  à somme nul. C'est-à-dire que ce que nous gagnons, l’autre perd forcément. C'est-à-dire aussi que si je n’ai pas quelque chose et que mon voisin a, je peux le tuer pour lui arracher cette chose.  C’est ce qui donne sa dimension assez cruelle à leur combat. Et y aller avec naïveté est impardonnable.

Déjà, il faut que les pièces que les chefs traditionnels ont amené à l’exposition de Paris retournent au pays et retrouvent les palais. Pour cela, le Ministère des Arts et de la Culture  peut déjà mettre sur pied une commission chargée de réceptionner et convoyer ces objets à leur retour. Il faut aussi que le Cameroun revendique et obtienne le retour objets d’art de ns chefferies comme ce fut le cas pour la sculpture en bois sacré « Afo Akom » qui avait été repris aux trafiquants d’objets d’art et qui trône aujourd’hui au palais royal de Laikom. Une autre question est celle de la santé spirituelle et du magnétisme sacré de ces objets qui ont voyagé dans les soutes d’avion car, dans ma tradition, il est dit « qu’une panthère qui traverse le fleuve devient une antilope une fois sur l’autre rive ».

Pour être là où ils sont aujourd’hui, les chinois n’ont pas hésité à aller au marché des civilisations. Mais ils ont su rester eux même, entourer leur démarche d’humanisme et surtout protéger jalousement leur immense et multimillénaire patrimoine culturel qui a pourtant été aussi pillé. Ils ont su prendre chez les autres, juste ce qu’il leur faut pour construire le logiciel indétectable qui sert à bâtir leur puissance dans le monde aujourd’hui. C’est dire si nous avons à apprendre de la Chine.

Dr Etienne Tayo Demanou

Délégué régional de communication de l’Ouest

Président du comité de Développement du village Toula-Ndizong (CODEVINDI)

Mail : tayoe2004@yahoo.fr

 

mercredi 30 mars 2022

 COMPRENDRE LA CHINE : L'AMOUR DU PEUPLE, LA CLE DU SUCCES DU PARTI COMMUNISTE CHINOIS


mardi 8 mars 2022

 

MANIPULATION : DE QUOI LE COMBAT POUR LES DROITS DE L’HOMME EST-IL LE NOM ?

Chaque année, la Chine et les Etats-Unis, deux ennemis intimes, font des publications croisées des rapports sur les droits de l’homme. Occasion pour les deux mastodontes de l’économie mondiale de se griffer dans une sorte de prolongement de la guerre commerciale.

Le 24 mars 2021, le bureau de l’information du Conseil des affaires d’Etat (gouvernement chinois) a publié un rapport sur les violations des droits de l’homme aux Etats-Unis en 2020. Selon ce rapport et, concernant la lutte contre la pandémie du coronavirus, « l’incompétence de Washington dans le contrôle de la pandémie a entrainé des résultats tragiques ». Sur la fin du mandat de Donald Trump et l’élection de Joe Biden, le rapport dénonce « un désordre démocratique qui a déclenché le chaos ». Le rapport relève que « les minorités ethniques ont souffert de discrimination raciale et l’agitation sociale continue à menacer la sécurité publique aux Etats-Unis ». De même, poursuit le rapport, « la polarisation croissante entre les riches et les pauvres a aggravé les inégalités sociales aux Etats-Unis ». Sur la politique internationale, le rapport relève que « le non respect des règles internationales par les Etats-Unis a entrainé des catastrophes humanitaires ».

Le 29 mars 2021, un peu comme le berger répondrait à la bergère, le Secrétaire d’Etat américain a supervisé  la publication du rapport 2020 du Département d’Etat américain sur les droits de l’homme. Comme il fallait d’y attendre, la Chine y tient une place de choix. En effet, sur la partie se rapportant à la Chine, « la situation au Tibet, et dans le Xinjiang avec les Ouïghours, la répression des manifestations de Hong-Kong et la gestion de la pandémie du covid19, sont autant d’arguments en faveur de la thèse d’une violation récurrente des droits de l’homme par les autorités chinoises ». Sur le Xinjiang particulièrement, le rapport américain parle du « génocide de la minorité Ouïghoure ». Comme il est de coutume, les Etats-Unis donnent souvent le ton de ce lynchage de la Chine et les autres pays occidentaux accompagnés de quelques ONG apparentés emboitent le pas pour enfoncer le clou dans une orchestration plutôt bien menée.   C’est ainsi que les parlements de Belgique, du Canada et des Pays-Bas et plusieurs ONG dont  Human Rights Watch qui a publié son rapport mondial 2021, ont  joint leurs voix à celle des Etats-Unis pour accabler la Chine. Ainsi, Human Rights Watch « accuse la Chine de crime contre l’humanité sur la population musulmane turcophone du Xinjiang ».

Au lendemain de la publication de ce rapport, la porte parole du ministère chinois des Affaires Etrangères a tenu à apporter un démenti formel : « Le soi disant génocide au Xinjiang est une invention absurde qui viole le droit international. Aucun pays, aucune organisation ni aucun individu n’a le droit ni le pouvoir de déterminer arbitrairement si un Etat est coupable ou non de génocide », soutient Mme Hua Chunying qui n’a pas hésité à contre attaquer : « Les Etats-Unis ne sont pas qualifiés pour condamner les droits de l’homme en Chine. Il est temps de mettre fin à cette farce écrite mise en scène et jouée par certains politiciens américains. Les groupes ethniques minoritaires en Chine vivent une vie plus heureuse, jouissant de plus d’égalité et de dignité. Leur vie est bien meilleure que celle des minorités ethniques aux Etats-Unis », se félicite-t-elle.

Cette passe d’arme entre les deux puissances économiques du monde sur le thème des droits de l’homme est une parfaite illustration de ce que les experts qualifient de « politisation des droits de l’homme » c'est-à-dire « l’intégration des droits de l’homme dans les objectifs de politique étrangère et leur instrumentalisation à des fins politiques, attisant ainsi des tensions dans des relations interétatiques (…) Une instrumentalisation qui a conduit à une interprétation et à une mise en œuvre politicienne du droit international des droits de l’homme au détriment de la promotion et de la protection des droits de l’homme et de leur universalité ». Avant que la Chine ne se décide depuis quelques années à produire des rapports pour se défendre et dénoncer ce qui se passe chez ses dénonciateurs, elle était la victime désignée de toutes les attaques du camp occidental conduit par les Etats-Unis et repris par les autres pays occidentaux. Ce concours de lapidation de la Chine a pris de l’ampleur au fur et à mesure que l’empire du milieu prenait du galon sur le plan économique et se posait ainsi en concurrent des Etats-Unis. Dès lors, le China-Basching, c'est-à-dire « taper sur la Chine » est devenu la posture partagée en occident par les politiques, les journalistes et même les intellectuels pour dénigrer et tenter de disqualifier la Chine. En Chine justement, la représentation d’un certain nombre  de ventres mous a été créée par la propagande occidentale. Le jeu consiste à « taper dessus » constamment pour faire souffrir la Chine, brouiller son image et au besoin la distraire et la freiner. Il y est parfois question d’utiliser certains relais pour manipuler la population et l’inciter au soulèvement. Pour ce faire, un très grand soin est mis sur la manufacture de l’émotion à travers des reportages, des documentaires, des ouvrages, des stories-telling… Ces ventres mous virtuels sont : Tibet, Xinjiang, Hong-Kong et Taïwan. Généralement le ton est donné dans les rapports des Etats et des ONG qui accusent la Chine de massacre au Tibet, de génocide ou de crime contre l’humanité au Xinjiang ou encore de torture de manifestants à Hong-Kong. Dès lors, les médias reprennent en boucle en essayant chacun de donner plus de crédibilité à son récit.

En conduisant cette étude, nous voulons aller au cœur de la pratique actuelle en cours dans le monde en rapport avec les droits de l’homme  pour comprendre ce qu’est devenu le combat pour la promotion et la préservation des droits de l’homme, comprendre ensuite pourquoi une telle dérive a pu s’installer et comment on peut y remédier.

Comprendre la politisation des droits de l’homme

Dans un ouvrage intitulé : « La politisation des droits de l’homme et le défi de la coopération universelle », Kellie Shandra Ognimba de l’université de Paris1 Panthéon s’est penché sur le fonctionnement des Nations-Unies sur son versant « droits de l’homme ». D’entrée de jeu, elle relève « des tensions persistantes entre les buts et le principe de l’ONU : la responsabilité de protéger et le principe de non ingérence ». Elle  reconnaît l’extrême politisation du thème des droits de l’homme « qui est au cœur du système onusien de promotion et de protection des droits de l’homme ». Cette politisation trouve sa source, selon elle, dans « les dispositions de la charte des Nations-Unies qui instaurent de manière ambivalente les bases de la coopération internationale en affirmant d’un coté, que l’organisation a pour but la réalisation et le respect effectif des droits de l’homme et de l’autre que le principe de souveraineté nationale doit être préservé ». Le deuxième écueil relève est ce qu’Ognimba appelle « l’antagonisme institutionnel », c'est-à-dire la cohabitation de deux entités antagonistes au sein du conseil des droits de l’homme, principal organe intergouvernemental en charge des droits de l’homme à l’ONU. A savoir : les organes gouvernementaux composés d’Etats qui ont la mainmise  sur le système et en sont les décideurs et les acteurs non gouvernementaux censés dépolitisés que sont les ONG et qui doivent faire le contrepoids aux Etats.

La configuration des acteurs au sein du Conseil des droits de l’homme fait de cet organe une véritable arène politique. Les groupes sont ainsi constitués par affinité et se regardent parfois en chiens de faïence. On a ainsi d’un coté les Etats-Unis, l’union européenne et les autres pays occidentaux ; le groupe africain ; les Bric’s… Au sein du Conseil, certains Etats voient les ONG come des instruments d’ingérence extérieure et des relais au service de la politique des autres Etats. Le camp occidental duquel relève la plupart des ONG est ainsi directement indexé. Ces mêmes Etats dénoncent la politisation des ONG qui naviguent entre « mélange de genres et monnayage de leur indépendance ». Ils récusent d’ailleurs « le caractère apolitique des ONG » car soutiennent-ils : « les ONG sont des acteurs politiques puisque intervenant sur un sujet hautement politique que sont les droits de l’homme et évoluant dans une arène très politisé qu’est le Conseil des droits de l’homme où leurs interlocuteurs sont des représentants gouvernementaux ».  Est venu s’ajouter à ce cocktail d’incompréhension et même d’animosité, une certaine conception occidentale de la pratique politique qui voudrait que « ce soit par l’intermédiaire de sa politique étrangère que l’Etat s’efforce d’assurer la défense sur la scène internationale, de l’intérêt national qu’il incarne ». C’est l’une des plus grosses faiblesses du système démocratique où chaque dirigeant n’est conditionné dans son action que par la prochaine élection présidentielle. Ainsi, en dénonçant à tout va la violation des droits de l’homme ailleurs dans le monde, on pense séduire ses électeurs en affichant un visage plus humain. Avec cette conception, il y a eu une intégration progressive du discours relatif aux droits de l’homme dans les politiques étrangères des Etats. Ce qui a accentué la politisation dans l’enceinte de l’ONU. Prenant conscience de la supériorité qu’ils disposent sur le plan de la communication et des médias à l’échelle de la planète, les Etats-Unis et les pays occidentaux ont pensé qu’ils peuvent user de l’instrumentalisation des droits de l’homme pour stigmatiser les autres pays concurrents et tenter ainsi de les disqualifier. D’où l’agressivité constatée dans ce domaine de la défense des droits de l’homme. Et nous nous trouvons là au cœur de l’institutionnalisation des droits de l’homme ainsi que de leur instrumentalisation à des fins politiques.

 

Dr Etienne Tayo Demanou

Promoteur du  Think-Tank  « ALTITUDE »

Auteur du livre : « Tout Chemin mène en Chine »

tayoe2004@yahoo.fr

 

 

 

HONG-KONG : COMMENT LE ROYAUME-UNI VEND LA CHEVRE ET RETIENT LA CORDE

Depuis deux ans, des manifestations des jeunes se succèdent à Hong-Kong avec une volonté clairement affichée de rendre cette péninsule ingouvernable pour la République Populaire de Chine qui en a pris le contrôle depuis 1997 à la faveur des accords de rétrocession signés en 1984 avec le Royaume Uni de Grande Bretagne et de l’Irlande du Nord.

La mèche de cet embrasement presque programmé a été allumée après que, dans un processus de reprise en main de la péninsule, la République Populaire de Chine a soumis au vote du parlement un amendement de la loi d’extradition. Ceci, dans le but de résoudre une énigme découlant d’un fait divers dans lequel un ressortissant hongkongais a assassiné sa copine à Taïwan et s’est refugié à Hong-Kong où il ne pouvait ni être jugé, ni être extradé vers Taïwan. Mais les pro-démocrates qui sonnent la mobilisation contre cet amendement pensent et disent que son adoption contribuera à « diluer la frontière juridique entre Hong-Kong et la Chine continentale ». Hong-Kong a un système du Common Law hérité du colon britannique alors que la Chine a le Droit civil. Finalement le projet de loi est d’abord suspendu en juin et définitivement retiré en septembre 2019. Mais malgré ces bonnes dispositions du gouvernement chinois, les manifestations redoublent d’ampleur et les revendications subissent de profondes mutations. Il n’est plus simplement question d’un retrait du projet de loi mais de remise en cause de l’accord de rétrocession. Des velléités sécessionnistes sont même perceptibles dans la démarche de certains manifestants.

Contre toute attente mais de manière objective, les revendications des manifestants trouvent écho  et obtiennent le soutien officiel de Londres et de plusieurs capitales occidentales telles Ottawa, Camberra, Washington où il est question de protéger le peuple Hongkongais contre l’ogre chinois. Les ministres des affaires étrangères britannique, canadien, Australien et Américain signent une déclaration pour dénoncer la décision chinoise qui selon eux « mine le principe d’un pays, deux systèmes ». Le Ministre britannique des affaires étrangères monte d’un cran dans la dénonciation : « Si la Chine applique sa décision, elle viole l’autonomie et les libertés du peuple de Hong-Kong. Ce n’est pas seulement une question légale, mais cela relève des obligations internationales de la Chine », souligne Dominic Raab.

Mais cette intimidation ne passe pas auprès de la Chine qui semble préparée au pire. Elle continue sereinement l’application de son programme de reprise en main de Hong-Kong suite à la rétrocession. Le 30 juin, la loi sur la sécurité nationale de Hong-Kong est votée. Cette loi permet à la Chine de réprimer 4 types de crimes contre la sécurité de l’Etat : subversion, séparatisme, terrorisme et collusion avec l’étranger. La justice de la République Populaire de Chine peut désormais juger certains actes considérés comme des infractions telles que les affiches de soutien à l’indépendance de Taïwan, du Tibet, du Xinjiang et de Hong-Kong.

Le 30 mars 2021, le président chinois promulgue, après un vote à l’unanimité des 167 membres du comité permanent du parlement chinois, une loi de réforme du système électoral hongkongais. Selon le gouvernement chinois, elle doit permettre « d’atténuer  la politisation excessive de la société et le clivage interne qui a déchiré Hong-Kong et vise à prévenir des manifestations comme celles de 2019 ». Désormais, le conseil législatif de Hong-Kong compte 90 membres dont 20 sièges au suffrage universel direct ; 40 siège attribués au comité des personnalités ;  30 sièges attribués par des groupes socioprofessionnels. Hong-Kong est dirigée par un chef de l’exécutif choisi par une élection ou consultations tenues localement. Il est ensuite nommé par le Président de la République.

Désormais muni de tous les instruments juridiques, le République Populaire de Chine qui, conformément aux accord de rétrocession,  a encore 26 ans pour faire entrer harmonieusement Hong-Kong dans la Chine, entreprend de faire régner l’ordre en provoquant contre son gré l’ire des occidentaux qui crient au loup et ne se cachent plus  pour soutenir les manifestants sous le prétexte de la protection des droits de l’homme et de la préservation du système démocratique. Londres organise l’exfiltration des manifestants tombés sus le coup de la loi. Ce qui rappelle à la Chine qu’après les manifestations de la place Tian’anmen en 1989, l’opération Yellow Bird organisée à partir de Hong-Kong par le Royaume Uni avait permis l’exfiltration de 400 dissidents chinois qui trouveront refuge en occident. Pour justifier leur ingérence, les occidentaux mobilisent comme d’habitude la rhétorique de la protection des droits de l’homme. Dans le souci de donner une base juridique à leur démarche, les occidentaux soutiennent qu’en enregistrant la déclaration conjointe de rétrocession à l’ONU, la République populaire de Chine et le Royaume Uni ont reconnu le besoin d’un tiers neutre et sa possible participation, alors qu’ils auraient pu simplement conclure un traité bilatéral.

Depuis 2019, et sans s’en cacher, le Royaume Uni est devenu la base arrière de tous ceux qui veulent déstabiliser la Chine sous le prétexte d’un combat pour un avenir démocratique de Hong-Kong. Il envisage d’ouvrir la voie de la nationalité  britannique à près de 350 000 titulaires de passeport pour britanniques d’outre mer à Hong-Kong. De leur coté, les médias occidentaux rivalisent de superlatifs pour faire gonfler la bulle de l’émotion et dénoncer ce qu’ils considèrent comme étant une nouvelle colonisation de Hong-Kong par la République populaire de Chine. Dans son Magazine « Reporters » que présente Antoine Cornery, la chaine française « France24 »  met en scène le scénario de départ en exil des jeunes de Hong-Kong en même temps qu’elle fait un reportage dans la banlieue londonienne où plusieurs activistes exilés ont établi leur quartier général. Dans une sorte de manufacture de l’émotion, le correspondant de « France 24 » à New-Delhi déroule le film d’un voyage sans retour d’une adolescente de 15 ans. Mui Mui puisqu’il s’agit d’elle est en route pour Londres devenue la base arrière des activistes de Hong-Kong.  Le reportage présente  Malcom, président d’une association basée à Londres et qui vient en aide  à ceux qui veulent fuir Hong-Kong. Selon le reporter, « cette association est financée par des riches donateurs hongkongais ». « Ils sont une dizaine d’activistes dans un appartement et soutiennent l’indépendance de Hong-Kong ». Cette jeunesse est venue, dit-elle, « trouver la liberté que Hong-Kong leur a refusé et rêve de faire du Royaume Uni la tribune de son combat ».

A priori, on pourrait s’apitoyer sur le sort de cette jeunesse hongkongaise quelque peu déboussolée et perdue dans les dédales d’une transaction faite entre le Royaume Uni, puissance coloniale et la République populaire de Chine, nouvelle mère patrie. Mais on devrait se rappeler que Hong-Kong, autant que Taïwan, Xinjiang, Tibet, n’est que la représentation  de ces ventres mous inventés pour la Chine par la propagande occidentale et à partir desquels elle fait fleurir le China Basching dans une perspective concurrentielle entre la Chine et l’Occident. Dès lors, les données du problème changent et pour ces jeunes à qui le Royaume Uni n’a pas dit toute la vérité sur les transactions de la rétrocession, la réalité pourrait être moins reluisante que la fiction. Ils se réveilleront alors un jour en comprenant qu’ils n’auront été que les armes d’un combat qui les dépasse.  Et qu’un jour, dans le Royaume-Uni où ils s’installent aujourd’hui  en croyant bénéficier de toutes les attentions, ils ne seront que des « Harkis » d’outre manche soumis à la discrimination.

En conduisant cette étude, il est question pour nous d’aller au cœur de la négociation ayant abouti à la rétrocession pour savoir si le sort du peuple de Hong-Kong avait toujours préoccupé le Royaume Uni ou avait-il fait ses propres affaires et se réveille  sur le tard juste pour utiliser le désarroi de la jeunesse hongkongaise comme moyen de chantage dans le but de briser les ailes au concurrent qu’est la Chine ? En cédant Hong-Kong à la Chine, le Royaume Uni était-il conscient qu’à l’échéance de 50 ans, comme stipulé dans les accords, c’est Hong-Kong qui entrera dans la Chine et non la Chine dans Hong-Kong ? Quel aura été finalement le degré de sincérité du Royaume-Uni dans cette opération de rétrocession de Hong-Kong à la Chine après plus d’un siècle d’occupation ? Dans la transaction, c’est Hong-Kong qui entrera dans la Chine ou c’est la Chine qui s’adaptera à Hong-Kong ? En clair, y aura-t-il une exception Hongkongaise ?

Ce sera Hong-Kong dans la Chine et non la Chine dans Hong-Kong

Hong-Kong ou port parfumé est aujourd’hui une région administrative spéciale située au Sud Est de la République Populaire de Chine. Peuplée d’un peu plus de  7 millions d’habitants, Hong-Kong est la huitième entité commerciale mondiale et troisième place financière après New-York et Londres. En 2017, l’espérance de vie à Hong-Kong est de 84,2 ans, la plus longue du monde. Colonie britannique au terme du traité de Nankin en 1842 pour une période de 99 ans, Hong-Kong le restera jusqu’à l’éveil de la Chine « lorsqu’à partir de 1979, le président Deng Xiaoping entreprend d’ouvrir économiquement la Chine avec l’étranger (…) L’expérience se limite d’abord dans des zones économiques spéciales. Shenzhen bénéficie en premier des investissements et connaît un développement spectaculaire. Hong-Kong situé aux portes de Shenzhen devient le point stratégique pour les échanges avec la Chine continentale ». Dès le début des années 80, la Chine entreprend de revendiquer la rétrocession de Hong-Kong conformément au traité de Nankin. Elle ouvre les négociations avec le Royaume-Uni et la déclaration sino-britannique sur la question de Hong-Kong est signée le 19 décembre 1984. Par cette déclaration, « le Royaume Uni s’engage à remettre à la Chine l’ensemble de la colonie en 1997. La République populaire de Chine s’engage à maintenir les systèmes économiques et législatifs et le mode de vie hongkongais pendant 50 ans ». Selon les termes de ces accords, le régime de la République populaire de Chine sera appliqué à Hong-Kong au terme des 50 ans c'est-à-dire après 2047.

La loi fondamentale de la région administrative spéciale de Hong-Kong est rédigée à la fin des années 80 au terme des négociations entre les représentants de la colonie et les chinois continentaux. Elle a été votée par l’Assemblée Nationale populaire en 1990 et est entré en application en 1997. En son article 23, cette loi fondamentale stipule que « Hong-Kong devra promulguer une ou des lois interdisant tout acte de trahison, de sécession, de sédition, de subversion contre le gouvernement populaire central ou de vol de secrets d’Etat, afin d’interdire aux organisations ou organismes politiques étrangers de mener des activités politiques dans la région et d’interdire aux organisations ou organes politiques de la région d’établir des liens avec des organisations ou des organes politiques étrangers ». Cette disposition pertinente de la constitution nous fait comprendre que la transaction faite entre la Chine et le Royaume-Uni s’est insérer dans une lutte d’influence planétaire dont l’enjeu est la mise en place d’un nouvel ordre mondial. Compte tenu d’un certain nombre de précédents, la Chine redoute que sous le fallacieux prétexte de la défense de la démocratie et des droits de l’homme, l’occident n’essaie come à son habitude, d’instrumentaliser Hong-Kong comme il le fait avec le Tibet, Xinjiang, Taïwan, pour la déstabiliser et freiner ainsi un concurrent sur le plan géostratégique. C’est pourquoi la Chine doit anticiper sur beaucoup de terrain car sa sécurité nationale en dépend.

Le problème qui se pose à Hong-Kong aujourd’hui et hypothèque la paix, c’est celui du vendeur de souveraineté à savoir le Royaume-Uni qui crie au loup en accusant l’acheteur en l’occurrence la Chine de ne pas respecter les termes de l’accord. A ce problème, nous pouvons opposer trois types de questions : lors des négociations en vue de la rétrocession qui ont duré de 1984 à 1997, le Royaume-Uni a-t-il réellement défendu les intérêts de son ancienne colonie et surtout ceux de son peuple ou s’est-il juste préoccupé de ce qu’il gagne dans l’affaire ? Est-ce que le Royaume-Uni, les autres pays occidentaux qui le soutiennent et les  médias occidentaux qui mettent en œuvre la propagande anti-chinoise, essayent d’expliquer à la jeunesse hongkongaise les vrais enjeux de ce qui se passe ou se contentent-ils de la manipuler dans le cadre du China-basching ? Le Royaume-Uni s’est-il préoccupé de ce que sera Hong-Kong après le délai de 50 ans ?

Il faut tout de suite rappelé que le Royaume Uni a engagé les négociations en position de faiblesse à cause de la position stratégique de Hong-Kong qui est non défendable militairement. Il y a aussi le fait que Hong-Kong affiche une dépendance très prononcée vis-à-vis de la  province chinoise de Guangdong. Il y a enfin une incertitude sur les baux immobiliers. Il est donc tout à fait possible que face à une telle situation, le Royaume Uni se soit contenté de sauver ses propres intérêts quitte à venir après coup pour jouer les défenseurs de la démocratie hongkongaise. Sur la prétention du Royaume-Uni d’accueillir tous les jeunes persécutés de Hong-Kong, il n’en est rien. Il n’a ni les moyens, ni la volonté de parvenir à un tel exploit. D’abord parce que la plupart des pays occidentaux sont en baisse de régime économique, et un afflux massif des réfugiés peut sérieusement déséquilibrer leur système socioéconomique. Ensuite parce que la majorité des jeunes qui manifestent aujourd’hui et sont candidats au départ ne sont malheureusement pas éligibles au fameux passeport pour Britanniques d’outre mer à Hong-Kong (BNO) car pour bénéficier de ce sésame il faut être né avant 1997. Conclusion, en l’état actuel des choses, les jeunes Hongkongais à qui le Royaume-Uni promet le paradis seront au pire des immigrés sans papiers au bout de 6 mois de séjour, au mieux des réfugiés. Il est donc urgent que face au destin de ces jeunes, une explication responsable soit privilégiée à la propagande avilissante afin de permettre à Hong-Kong d’entrer harmonieusement dans la République populaire de Chine.

Dr Etienne Tayo Demanou

Promoteur du Think-Thank « ALTITUDE »

Auteur du livre : « Tout chemin mène en Chine »

 

 

 

REUSSITE : CONTRIBUTION DU PARTI COMMUNISTE DANS L’ESSOR DE LA CHINE

En cette année 2021, 42 ans seulement après son ouverture sur le monde et 13 ans après les jeux olympiques de Pékin, la Chine s’apprête une fois de plus à  commémorer les 100 ans de la fondation du parti communiste chinois en 1921.

Entre autre activités, les instances du parti organiseront :   des séances d’étude et de formation sur l’histoire du parti combinée à la consolidation et à l’approfondissement des acquis ainsi que des expositions thématiques à grande échelle sur le thème : « Rester fidèle à l’engagement initial et garder à  l’esprit la mission » ; des activités d’information et de formation destinées aux masses sur le thème : « Marcher pour toujours avec le parti »

Mais l’échéance de 2021 est spéciale parce qu’elle permet en même temps de célébrer les victoires de la Chine sur elle-même. Lesquelles sont innombrables et impressionnantes : la pauvreté est vaincue sur toute l’étendue du territoire, d’après le président Xi Jinping ; la Chine est désormais le maître de l’espace  avec des voyages sur la lune et l’atterrissage réussi de la sonde Tianwen-1 sur Mars ainsi que les exploits de Taikonautes chinois dans  la construction de la station spatiale Tiangong ; la Chine est devenue la première  puissance économique du monde selon la parité du pouvoir d’achat ; la Chine est la deuxième puissance militaire en termes de dépenses ; comme l’écrit le reporter du journal La Croix, « la Chine est parvenue à maîtriser la pandémie du Covid19 en quelques mois et aujourd’hui, les chinois mènent une vie normale, se sentent en sécurité chez eux ». Comme on peut le relever, cette Chine qui s’est éveillée en quatre décennies, a gagné tellement de galons sur la sphère de l’influence mondiale que désormais, tous les chemins semblent y mener.

Mais l’originalité de l’approche Chinoise et peut-être même la base de sa puissance est son modèle politique basé sur le rôle central du Parti Communiste Chinois (PCC) dans l’émergence et la prospérité de la Chine. Ce parti aux « 66 millions d’adhérents et  plus de 3,5 millions d’organisations de base » fêtera son 100ème anniversaire en juillet 2021. Et pourtant, malgré le temps, malgré la longueur du chemin, malgré les embûches qui l’ont parsemé et le parsèment encore, malgré les humiliations subies par son peuple de la part des autres, malgré les profondes mutations qu’il a subies pour s’adapter aux évolutions comportementales et technologiques du monde, le Parti Communiste Chinois semble n’avoir jamais dévié de sa ligne originelle, n’avoir pris aucune ride et surtout conserve toute l’influence qui avait présidé à sa création en 1921 et qui permet aujourd’hui à la Chine « de passer d’un pays pauvre et faible, intimidé par les autres, à un pays fort et prospère » qui se trouve désormais sur le toit du monde.

Les atouts du Parti Communiste Chinois dès sa fondation en 1921, c’est de s’être inséré dans le mouvement révolutionnaire de la fin des années 10 tout en se laissant porter par une vague aux racines endogènes et par un peuple au nationalisme à fleur de peau. Les difficultés auxquelles le parti se trouvera confronté tout au long de la longue marche  et le soutien du peuple feront du PCC un parti proche des préoccupations de la base. Comme le reconnait l’ancien premier ministre japonais, « au cours du dernier siècle, la Chine a souffert de nombreux malheur et difficultés dont l’agression commise par le Japon, mais le PCC a toujours travaillé avec  le peuple pour surmonter ces nombreuses difficultés », soutient Yukio Hatoyama. Et de conclure : « Si l’on jette un regard sur cent ans d’histoire, toujours être du coté du peuple constituera le secret des grandes réussites du Parti Communiste Chinois dans les annales de l’histoire ». Le président Xi Jinping est dans la même longueur d’onde lorsqu’il affirme « qu’avec la confiance et le soutien du peuple, le parti peut surmonter toutes les épreuves et rester invincible »

En conduisant cette étude portant sur la contribution du parti communiste à l’essor de la Chine, nous voulons aller au cœur de la gouvernance chinoise et nous intéresser à la démarche fusionnelle qui est celle du PCC et le gouvernement d’une part, et celle du PCC et  le peuple chinois d’autre part. Nous voulons comprendre comment et pourquoi le parti  a toujours accompagné le gouvernement avec le soutien indéfectible du peuple, dans l’acquisition des victoires énumérées ci-dessus. Nous voulons comprendre sur quel levier le PCC fait reposer sa gouvernance et quelles approches originales adopte-t-il pour gagner la confiance du peuple et devenir comme nous le constatons aujourd’hui un acteur global et majeur de l’émergence de la Chine.

Notre démarche méthodologique nous conduira dans l’histoire du PCC pour comprendre comment les épreuves parfois insurmontables qui ont marqué la marche de la Chine et celle du PCC peuvent forger un destin exceptionnel et pousser un peuple à se souder dans son Parti pour en faire l’unique bouclier et finalement un partenaire incontournable de son épanouissement. Nous visiterons quelques théories sur les Partis politiques en les confrontant avec la réalité chinoise. Ce qui nous permettra de comprendre avec le PCC chinois comment, en mettant le destin de son peuple au cœur de toutes ses préoccupations, un Parti politique peut être autre chose qu’un appareil de conquête et de conservation du pouvoir politique.

La longue marche… vers la prospérité

A la base du Parti Communiste Chinois, l’histoire nous révèle « l’action d’un petit groupe d’étudiants et de professeurs proches des idées socialistes qui, après avoir déclenché le mouvement du 4 mai 1919, auraient fondé dans la continuité de leur action le PCC». Puis les étapes importantes qui ont forgé l’âme du Parti triomphant d’aujourd’hui sont : la fondation du parti en juillet 1921 qui marque la Renaissance de la Chine et constitue l’un des socles de la légitimité du pouvoir communiste ; la longue marche de Mao Zedong qui a forcé le respect des chinois et du monde entier et « permis à la Chine de chasser les puissances étrangères, effacer  les humiliations subies pendant les deux guerres de l’opium et retrouver sa place parmi les grandes nations mondiales » ; l’avènement de la République Populaire de Chine (RPC) qui marque la consécration de la légitimité portée par le Parti et sans cesse validée par le peuple.

A chaque époque de sa glorieuse histoire, le Parti communiste a eu des dirigeants ingénieux et charismatiques qui ont creusé chacun une rivière dont la rencontre avec les autres rivières a fini par créer l’océan de prospérité dont le peuple chinois est fier aujourd’hui. Ainsi, Mao Zedong, le père de la longue marche, a expérimentée la théorie de guerre populaire prolongée (GPP) reposant sur la mobilisation et la militarisation du peuple.  C’est Mao qui proclame la République Populaire de Chine en 1949 et la conduit jusqu’à sa mort en 1976. L’histoire retiendra comme événement majeur de la marche du Parti Communiste Chinois, le 11ème congrès  de 1978 au cours duquel « la Chine nouvelle a réalisé une tournure de grande portée historique depuis sa fondation ». C’est en effet au cours de ce congrès que le nouveau Secrétaire Général Deng Xiaoping a lancé « la politique de réforme et d’ouverture » qui sera expérimentée dès 1979. Une stratégie dont l’implémentation rigoureuse au fil des années soutient la prospérité de la Chine d’aujourd’hui.

Après Deng Xiaoping, trois autres stratégies de trois dirigeants ont été expérimentées pour assumer l’adaptation du Parti au nouveau contexte international. Ainsi en est-il du plan de 1995 de Jiang Zemin qui préconise « la construction de la civilisation spirituelle socialiste ». Il soutient à l’appui « qu’il faut prouver que le parti fournit la dynamique capable de faire briller la flamme de la culture et de la tradition chinoises plus clair et plus haut ». Au 16ème congrès tenu en 2002, il est développé « la pensée de triple représentativité : le parti communiste chinois représente les exigences du développement des forces productives avancées en Chine ; représente l’orientation du progrès de la culture chinoise avancée ; représente les intérêts fondamentaux de l’écrasante majorité de la population en Chine ».  Pour sa part, le Président Hu Jintao transmet un message plus populiste, plus soucieux du sort des paysans et des pauvres des villes. Avec lui, « la démocratie locale s’est affirmée au niveau des villages ». Avec le Président Xi Jinping dont « la pensée sur le socialisme à a chinoise de la nouvelle ère » est inscrite dan la charte du Parti Communiste Chinois, le pragmatisme revient de même que le recentrage sur l’économie. Il propose la stratégie à « double circulation ». Il s’agit d’un paradigme de développement caractérisé par une double circulation de la Chine. « Il est basé sur le renforcement mutuel des marchés intérieur et extérieur avec le marché intérieur comme pilier ». Il est question de libérer le potentiel de la demande intérieure. Les experts pensent « qu’avec la stratégie de double circulation, les relations de la Chine avec l’économie mondiale deviendront encore plus étroites »

Jamais sans mon peuple… jamais sans ma Chine

Dès sa création, les dirigeants du Parti Communiste Chinois ont compris que cette entité politique ne peut gagner son plein essor qu’en s’incarnant dans le peuple. Il s’agit d’un Parti de masse où autant que faire se peut les clivages sont aplatis et le soutien au gouvernement garanti : « Selon une enquête menée par le Bureau National des Statistiques,  97,3% des personnes interrogées ont exprimé leur satisfaction quant à l'amélioration de la conduite du Parti,  des pratiques de travail des responsables gouvernementaux et de la moralité sociale ". Et pour atteindre un tel résultat,  il faut avoir à la tête du pays et du Parti des hommes de conviction au charisme établi, des dirigeants qui sont convaincus de ce que seule une approche fusionnelle entre l'Etat, le Parti et le peuple est à même de donner des résultats spectaculaires tel qu'on les observe en Chine aujourd'hui. Et voici comment le Président Xi Jinping exprime ses convictions en la matière : « L'histoire a fourni de nombreuses preuves que l'État est le peuple et le peuple est l'État  (...) Avec la confiance et le soutien du peuple, le Parti peut surmonter toutes les épreuves  et rester invincible », soutient-il.

En Chine, la proximité entre le Peuple et son Parti, laquelle dénote une confiance soutenue, et les victoires spectaculaires  remportées par l'empire du milieu dans le monde aujourd'hui  nous montrent que la confiance du Peuple est l'oxygène de tout Parti politique qui veut remplir pleinement ses fonctions et se pérenniser.  Mais cette confiance n'est nullement une sinécure pour le Parti en ceci qu'elle doit être entretenue. Et le Président Xi Jinping nous esquisse ici les raisons qui ont conduit à la consolidation de cette confiance en Chine : « Le parti a gagné le soutien sans réserve du peuple parce qu'il a toujours servi celui-ci  avec cœur et âme  et a lutté pour le bien être de tous les groupes ethniques (...) Dans son propre travail, le Parti suivra la ligne des masses, s'assurant que tout est pour le Peuple et que tout repose sur le Peuple ». Pour sa part,  Stephen Perry,  président du 48 Group Club britannique célèbre lui aussi ce mariage de raison entre le PCC et le Peuple chinois : « La position de base du PCC a été,  est et continuera d'être axée sur le peuple, d'entendre le peuple et d'adopter les bonnes politiques pour répondre aux besoins du peuple »

La confiance du Peuple dont il est question ici est gagnée à cinq niveaux au moins :

- Le stage d'imprégnation des futurs dirigeants du PCC a la base : De nombreux dirigeants chinois ont commencé leur carrière à la base en affrontant les difficultés auxquelles les gens ordinaires sont confrontés.  Cette immersion à la base a des bénéfices à deux niveaux pour le parti : le militant de base s'identifiant au futur dirigeant lui accorde toute sa confiance  et est prêt à se soumettre à son leadership  ou à celui de ses semblables ;  le futur dirigeant une fois installé aux affaires  comprendra plus facilement les besoins exprimés par la base puisqu'ils ne lui sont pas totalement étrangers.  Et on dira « qu'une bouche qui a tété n'oublie jamais la saveur du lait ». Il sera donc prompt à résoudre les problèmes de la base et gagnera ainsi sa confiance ;

- La lutte contre la corruption : Sur cette lutte, le Président Xi Jinping dit exactement ceci avec une fermeté frappante : « Nous frapperons à la fois les tigres et écraserons les mouches et ferons prospérer le système  dans lequel les responsables n'osent pas, ne peuvent pas, et n'ont aucun désir de commettre des actes de corruption  dans leur ensemble ». Cette assurance de la base de ce que le sommet s’engage contre l’impunité et  l’égalité de tous devant la loi est de nature à construire la confiance des militants de la base qui peuvent ainsi donner de leur temps, de leur sang et de leur sueur sans douter de la destination  de leur sacrifice.

- Une démarche empreinte d'autonomie et de fierté nationale : Au cours des cent derniers années,  le PCC et la Chine ont surmonté des obstacles les plus durs, subi les humiliations les plus dégradantes,  le peuple a vécu l'une des misères les plus insupportables.  Mais la Chine n'a jamais laissé à aucun autre pays, à aucune organisation internationale le soin de lui dicter la voie à suivre. En clair, les dirigeants n'ont jamais trahi. Ils se sont évertués à rentrer puiser dans le passé glorieux de la Chine éternelle pour inventer une direction vers laquelle ils mèneront le peuple. Et comme dit la sagesse chinoise : « La direction détermine la route, la route détermine le destin ». Et quand on parle de route, on pense à « la route de la soie » qui a fait la puissance de la Chine et qui est en cours de réhabilitation dans le cadre de « la route et de la ceinture » Le destin fabuleux qui est celui de la Chine aujourd'hui. Un peuple qui a longtemps souffert des atrocités d'autres peuples envahisseurs fait forcément confiance  aux dirigeants  qui les aident à laver cet affront et à être fier d'eux-mêmes et de leur pays.

- La discipline qui fait du bien : Lorsque la confiance est établie,  la discipline devient une routine et tout le monde y gagne. La gouvernance de la Chine dans le cadre de la lutte contre la pandémie du coronavirus  est citée en exemple dans le monde grâce aux résultats spectaculaires remportés dans ce cadre : « La Chine est devenue l'un des premiers pays à contenir le virus. Elle a rendu le traitement COVID 19 gratuit, s'engageant à traiter chaque patient et à ne laisser personne sans surveillance ». Et si elle est parvenue à un tel résultat,  c'est parce que le PCC a été mis à contribution  et a ainsi profité  de la confiance que lui témoigne le peuple pour faire passer et faire respecter les consignes,  très loin d'une certaine cacophonie qu'on a remarqué ailleurs dans le monde.

- Les victoires au bout du compte : Évidemment,  les victoires du PCC  et de la Chine sur les plans économique, politique,  militaire,  spatial... sont les vrais socles sur lequel le peuple chinois fait reposer sa confiance à son Parti et à ses dirigeants.  La prospérité de la Chine dont on parle n'est pas une donnée théorique puisque chaque citoyen voit sa condition de vie et celle de ses voisins s'améliorer : « Depuis le début de la réforme et de l'ouverture à la fin des années 1970, plus de 770 millions de personnes sont sorties de la pauvreté  en Chine grâce aux efforts continus de lutte contre la pauvreté  dirigée par le PCC.  Début 2021, le président Xi Jinping a annoncé que la Chine avait éliminé  la pauvreté absolue ».

Dans un monde qui cherche encore ses marques et dont les bouleversements sont parfois spectaculaires, le modèle chinois s'offre à nous et laisse scintiller ses réalisations en Chine et dans le monde. La Chine prospère s’offre ainsi à notre regard et un proverbe Bulu au Cameroun dit que « le regard tranche tous les débats ». Autrement dit, ce regard incite les dirigeants du monde à la prise de décision sage et courageuse. Plus que n'importe quel autre partie du monde, l'Afrique qui a longtemps erré est ici fortement interpellée pour prendre ses responsabilités et toutes ses responsabilités par rapport à son destin et à celui de son peuple.

Dr Etienne Tayo Demanou

Promoteur du Think-Tank : « ALTITUDE »

Auteur de : « Tout Chemin mène en Chine »

tayoe2004@yahoo.fr

 

dimanche 6 mars 2022

Une nouvelle ère pour la coopération sino-africaine - Episode 1 - Les rê...


AU DELÀ DE LA PANDÉMIE : DE QUEL MONDE RÊVE LA CHINE ?

Le débat pernicieux sur l’origine du nouveau coronavirus, sur le prétendu retard pris par la Chine pour informer le monde sur la pandémie et sur la connivence avec l’OMS. Tout ceci vise une seule chose : engager la responsabilité de la Chine dans la survenue du COVID-19, la précipiter ainsi au banc de la communauté internationale et l’amener à payer des réparations au reste du monde. Par ailleurs, la stigmatisation qui va avec conduira à l’isolement d’une Chine présentée comme un véritable ogre mangeur d’enfants. Et le fait que les États-Unis soient à la pointe de cette campagne de désinformation et de manipulation n’est pas un fait du hasard et montre que nous sommes déjà dans une lutte des puissances. Cette manipulation emprunte des chemins classiques de la désinformation,  vise les pauvres d’esprit et voudrait passer le message simpliste suivant : la Chine a fabriqué un virus pour exterminer les autres populations du monde, pour mettre le reste des pays du monde à genoux, pour prendre le leadership du monde et imposer un nouvel ordre impérialiste sur les pays d’Afrique par le biais des dons dans le cadre du COVID-19.

Face à ce message et la gravité de l’accusation qu’il porte et compte tenu de ce que la Chine est une puissance émergente dans le monde aujourd’hui, nous voulons aller au fondement du monde tel que la Chine l’envisage pour essayer de comprendre si l’extermination des autres peuples de la planète pourrait être au programme du déploiement de cette puissance émergente. La Chine est une vieille civilisation millénaire qui, après plusieurs siècles de passage à vide, est en train de reconquérir sa place dans le concert des nations. La Chine a comme modèle connu, « le socialisme à la chinoise ». Depuis le 24 octobre 2017 lors du 19ème congrès du parti communiste chinois, la boussole du bateau Chine est inscrite dans la charte du parti sous le nom de « la pensée de Xi Jinping sur le socialisme à la chinoise de la nouvelle ère ». Nous voulons la décrypter surtout sur son volet politique étrangère, à la recherche de l’humanisme que les autres tentent de lui contester à la Chine.

La pensée du président Xi Jinping a intégré la charte du parti communiste après celle de Mao Zedong en 1945 lors du 7e congrès et celle de Deng Xiaoping en 1997 lors du 15e congrès. Cette pensée se compose de 14 principes essentiels. Et en la parcourant, notre attention a été attirée par trois principes en raison de leur capacité à proclamer l’humanisme. Il s’agit de : « promouvoir la construction d’une communauté de destin pour l’humanité ; l’objectif principal du développement est d’améliorer la vie et le bien être des personnes ; le parti communiste doit avoir une approche centrée sur les individus pour l’intérêt public ». Si pour Deng Xiaoping, le père de la croissance chinoise, « La Chine doit cacher ses forces et attendre son heure », le président Xi Jinping pense que « cette heure est arrivée ». Et les jeux olympiques de 2008 marquaient l’ouverture de la Chine sur le monde et permettait au monde d’aller vers la Chine.

Réforme et ouverture

L’émergence de la Chine a tout de suite été interprétée par des puissances régnantes comme une menace. D’où l’érection des défenses connues sous le nom de « china-basching » et dont l’objectif clairement affirmé est la stigmatisation systématique de la Chine et la provocation avec pour but de l’attirer dans une confrontation. Et pourtant, la rhétorique pacifique du discours chinois transpire dans un certain nombre de concept qui accompagne le « rêve chinois » compris comme le prolongement au 21e siècle de la notion de « prospérité et puissance » élaborée par les modernistes chinois du 19e siècle. Ces concepts sont : « le développement pacifique ; un monde harmonieux ; le développement scientifique ». La pensée de Xi Jinping adhère au « principe de la coexistence pacifique et se fonde sur les valeurs du respect mutuel, de l’équité, de la justice et de la coopération gagnant-gagnant » La nouvelle Chine est venue pour « promouvoir l’établissement d’un nouveau type de relations internationales ». Un nouveau type qui est, comme le propose la pensée de Xi Jinping, « contre l’unilatéralisme et le protectionnisme qui portent atteinte à la confiance et à la coopération entre divers pays. Elle incite la Chine à tisser vigoureusement des partenariats mondiaux ». La Chine « tourne ainsi le dos au modèle consistant à établir des alliances politiques et militaires et renonce à la mentalité de la guerre froide et à la politique du plus fort ».

Si elle refuse d’emprunter les mêmes chemins de la confrontation que ses devanciers sur la scène internationale, la Chine sait néanmoins qu’elle est venue, en tant que pays émergent,  porteur d’une mission. Pour elle, « la montée des puissances émergentes (BRIC’S) avec l’évolution des rapports de force dans le système international exige en toute objectivité de réformer le système de gouvernance mondiale et de reconfigurer l’ordre international ». Le pays de Xi Jinping pense « qu’il y a lieu d’augmenter de façon équitable et juste le droit pour les pays émergents et en développement de faire entendre leur voix et de participer à l’élaboration des règles, afin de promouvoir la réforme et l’amélioration du système de gouvernance mondiale et d’assurer son développement sain en le rendant plus impartial, inclusif, équitable et durable. L’objectif étant de réaliser à pas assurés la démocratisation des rapports internationaux ». Cela s’appelle, troubler le sommeil des puissants.

Le concept de communauté de destin pousse la Chine à s’engager dans un certain nombre de projets à  l’échelle de la planète. Et si elle le fait, c’est moins pour dominer que pour partager la prospérité parce que pense-t-elle, c’est en sortant le maximum des peuples du monde de la pauvreté qu’on pourra garantir la paix pour tous. Le projet le plus en vue dans ce cadre est celui dit de la « ceinture et de la route ». Et voici ce que la pensée de Xi Jinping dit à propos : « La co-construction de  haute qualité de la « ceinture et la route » vise à bâtir la plateforme de coopération internationale la plus inclusive au monde ainsi qu’à fournir un large éventail de biens publics mondiaux à la communauté internationale, en particulier aux pays en développement. Elle projette de créer des opportunités à la connectivité et à la coopération en neutralisant les possibles causes de confrontation et de conflit, ainsi qu’à affermir les bases de la paix, la stabilité et la prospérité mondiales par le biais du développement commun de tous les pays ». La Chine qui parle ainsi est celle qui, en moins de 40 ans a sorti plus de 800 millions de personnes de la pauvreté. Une expérience qu’elle voudrait partager à l’échelle de la planète.

Ce qui fait problème et fait que la Chine soit une cible pour les puissances régnantes qui ont jusque là conduit le destin de l’humanité, c’est que la Chine de par son discours et son action, nous éloigne du piège de Thucydide qui a commandé jusque là les relations internationales selon lequel « les puissances dominantes entre logiquement en conflit avec les puissances émergentes » ou encore que « toute grande puissance pratique l’hégémonie ». A la place, la Chine « promeut avec constance la démocratisation des rapports internationaux et la réforme constructive des systèmes internationaux ». Au vue de la taille de ce combat, nous retenons au moins deux choses : la Chine ne peut pas se faire que des amis surtout de la part de ceux qui conçoivent le monde essentiellement en centre et périphérie. L’Afrique sera le premier bénéficiaire autant des réformes que du nouveau monde que propose la vision de la Chine.

Dr Etienne Tayo Demanou

« ALTITUDE » : Centre d’études et de réflexion sur la coopération sino-africaine


ORIGINE DU CORONAVIRUS : COMPRENDRE LA STIGMATISATION DE LA CHINE

Après le coronavirus et ses ravages dans le monde, bienvenue au virus de la stigmatisation

Alors que la majorité des pays du monde affrontent  encore, avec plus ou moins de fortune, la pandémie du coronavirus,  l’hypothèse d’une « fuite dans le laboratoire P4 de l’Institut de Virologie de Wuhan » a germé dans la presse américaine sous inspiration de la Maison Blanche. Depuis, comme soutient un éditorialiste de BFMTV, « elle enfle, occupe les chancelleries et enflamme les rapports diplomatiques ». Que l’on soit en Chine, aux États Unis ou ailleurs dans le monde, les réseaux sociaux sont devenus le lieu de déchainement des « passions conspirationnistes » par rapport à cette pandémie. Il y a quelque part une réelle volonté de faire passer de simples hypothèses pour des conclusions d’une vraie enquête.

En l’état actuel des recherches sur les origines du Coronavirus, responsable de la pandémie planétaire, l’unanimité est presque faite sur le caractère non intentionnel de l’acte ayant conduit à la génération du virus et à sa propagation. D’après l’Élysée, « il n’existe à ce jour aucun élément factuel permettant de corroborer les informations qui ont circulé dans la presse étasunienne établissant un lien entre l’origine du Covid 19 et les travaux du laboratoire  P4 de Wuhan en Chine ». Pour Richard Ebright, microbiologiste à l’université  de Rutgers aux États-Unis, « le coronavirus n’est pas une arme bactériologique et la Chine n’a pas provoqué sciemment cette épidémie ». Une thèse confortée par le directeur scientifique de l’Institut Pasteur : « Non, le coronavirus n’a pas été créé en laboratoire », soutient Olivier Schwartz. Il poursuit : « En dressant l’arbre généalogique de ce virus, on sait qu’il dérive d’un virus qui circule dans la nature (…) On le voit en étudiant le patrimoine génétique du virus, qui a été séquencé par les équipes chinoises et ensuite vérifié dans de nombreux autres laboratoires dont le Centre Pasteur qui a été le premier en Europe à la faire » conclut-il

Selon Jonna Mazet, infectiologue de l’université de Californie cité le 2 mai par le journal Business Inside : « l’hypothèse d’une fuite du nouveau coronavirus depuis un laboratoire est très invraisemblable ». La spécialiste qui avait formé les chercheurs de l’Institut de virologie de Wuhan et collaboré avec l’Institut a donné au moins 4 raisons : « l’incohérence entre le nouveau coronavirus et les échantillons trouvés dans le laboratoire de Wuhan ; le protocole de sécurité stricte du laboratoire de Wuhan ; le nouveau coronavirus doit être le dernier à avoir atteint l’homme en provenance d’un hôte animal, donc rien à voir avec un laboratoire ; les chercheurs utilisent les équipements de protection lorsqu’ils entrent en contact avec les chauves souris ».

Affaiblir un adversaire

Et pourtant, lorsqu’on met bout à bout les insinuations, les allusions et les non dits des discours politiques et médiatiques sur la pandémie surtout aux États-Unis, il ressort qu’il y a une réelle volonté de criminaliser la Chine, de la précipiter au banc de la communauté internationale et disqualifier sa réussite et sa puissance comme étant le résultat d’activités criminelles : « That’s Chinese virus. The schould pay for it », se plaisait à dire Donald Trump jusqu’à une date récente lorsque la real politik l’a fait revenir à un langage moins cru. Cette recherche effrénée du bouc émissaire se construit de proche en proche à l’aide des raccourcis médiatiques et des circonlocutions diplomatiques qu’usent et abusent, sur fonds de rivalités géopolitiques, autant certains journalistes que des dirigeants de ce monde. De façon très incompréhensible, la recherche de l’origine du virus est devenue plus importante que la mobilisation des ressources en vue d’éradiquer un mal qui menace l’espèce humaine dans son ensemble. On peut penser avec Ulysse Gosset, éditorialiste à BFMTV que « du coté de Trump, très critiqué sur sa gestion de la crise, il y a un enjeu considérable ».

Sur cette origine du virus en effet, certains grands de ce monde qui ont la Chine en ligne de mire, choisissent l’art de la petite phrase assassine.  Il en est ainsi de Emmanuel Macron qui affirme, suspicieux, dans le Financial times : « Il y a manifestement des choses qui se sont passées qu’on ne sait pas ». Du coté du Ministère des Affaires Étrangères Britannique, Dominique Raab plante lui aussi une flèche : « Après le cataclysme, la Chine devrait  répondre à des questions difficiles », lance-t-il. Pour sa part, le Secrétaire d’État américain Mike Pompéo enfonce le clou : « Ce que nous savons, c’est que ce virus est né à Wuhan en Chine (…) Nous menons une enquête exhaustive sur tout ce que nous pouvons apprendre sur la façon dont ce virus s’est propagé, a contaminé et a provoqué une telle tragédie », déclare-t-il sur Fox News. Lors de sa conférence de presse quotidienne à la Maison blanche, Donald Trump sème le doute : « Si la Chine était sciemment responsable, oui, alors il devrait y avoir des conséquences », conclut-il. Toutes ces circonlocutions concourent à  cette construction  dénonciative : « La Chine a fabriqué le virus pour s’enrichir. Elle doit l’avouer et dédommager le monde ». Juste un moyen pour les États-Unis d’affaiblir un adversaire.

Comme l’affirme Zhong Sheng du quotidien du peuple : « La stigmatisation de la Chine ne sera jamais un médicament salvateur, elle ne sauvera aucune vie (…)  La stigmatisation de la Chine semble être un moyen de distraire l’attention des gens  pour cacher leur propre insuffisance face aux maladies épidémiques. A l’heure actuelle, la priorité absolue du monde est censée être un réponse globale et coordonnée à la double crise sanitaire et économique causée par la pandémie. Cette stratégie de l’accusation est non seulement inutile mais également dangereuse ».

 

Dr Etienne Tayo Demanou

« ALTITUDE » : Groupe d’Étude et de Réflexion sur la Coopération Sino-africaine

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