Il y a une un peu plus d'une semaine, le 7 septembre 2007, le président camerounais Paul Biya procédait à un réaménagement du gouvernement. Juste une retouche technique qui a quand même conduit au départ de certaines personnalités de premier plan. Grande déception tout de même chez ceux qui attendaient un remaniement gouvernemental avant au besoin un changement de Premier ministre.
Comme après chaque mouvement politique au Cameroun, j'ai appelé deux ou trois personnes pour savoir ce qui se dit dans l'opinion au-delà des analyses de quelques exégètes du dimanche. Au Cameroun le pouvoir est tellement hermétique qu'il ne laisse filtrer que ce qu'il souhaite voir répandre dans l'opinion. Alors la presse s'en empare et fait le reste.
La première personne que j'ai contactée n'a pas caché sa satisfaction par rapport au départ du ministre de l'Economie et Finances, Polycarpe Abah Abah : "Nous avons fêté le départ de Abab Abah. Il a failli nous tuer avec les impôts. Si je n'étais pas très solide, j'aurai moi-même eu un arrêt cardiaque comme les autres", dit-elle. Cette personne m'annonce aussi qu'avec le départ de Abah Abah, c'est la prospérité économique qui s'annonce pour le Cameroun : "Sarkozy a dit qu'il va nous aider. Et nous savons qu'il fait toujours ce qu'il dit. Nous sommes très confiants", dit-elle en faisant à sa manière la lecture du discours de Sarkozy à Dakar qui pourtant dans les milieux intellectuels africains avait reçu une volée de bois vert. Et j'ai compris l'écart qui existe encore en Afrique entre le discours des intellectuels et la compréhension de l'opinion de la base. Cette préoccupation, je l'avais déjà ressentie avant de rédiger une réflexion intitulée : "Les défis des intellectuels africains de la diaspora". Cette personne, je l'ai rappelé trois jours après et elle m'a annoncé non sans satisfaction que "les auditions de Abah Abah avait déjà commencé à la police". Des informations pas toujours vérifiées qui sont souvent aussi malheureusement relayées par la presse camerounaise où on annonce une deuxième opération épervier : "Abah Abah et Cie annoncés au Sed", titre le Messager, l'un des principaux quotidien privé camerounais.
Une deuxième personne que j'ai appelée est celle qui m'avait déjà annoncé une fois avec une pointe de fierté que "au Cameroun, nous sommes maintenant gouverné par l'ambassadeur des Etats-Unis. Il donne les ordres et notre président exécute". J'en avais été choqué. Que nous soyons tombé si bas au point d'être dirigé par l'ambassadeur d'un autre pays, fut-il une grande puissance. Cette personne est donc revenue cette fois pour me faire d'autres annonces. Selon elle, c'est finalement le fonds monétaire international dont une mission se trouve au Cameroun qui a finalement obtenu la tête d'Abah Abah.. Elle m'a dit aussi que l'ambassadeur des Etats-Unis (encore lui!) a demandé de tout faire pour que l'opposition ait un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale au risque pour le Cameroun de représenter aux yeux du monde l'image d'une démocratie monopartisane. Et c'est comme çà qu'elle explique le lâchage des ténors politique du Rdpc comme Françoise Foning, la députée-Maire de Douala 5e qui a vu ses deux élections annulées par la cour suprême.
Mais la vedette au Cameroun reste Polycarpe Abah Abah, le parfait fusible. Et il faut se lever très tôt pour lui voler la vedette. En fait, dans l'opinion camerounaise, on accuse l'ancien ministre de l'Economie et Finances de crimes collatéraux ou si vous voulez d'homicide involontaire. On parle particulièrement à Yaoundé du cas de deux hommes d'affaires promoteurs d'agences de voyages.
Tala Voyages, le propriétaire de l'agence qui porte son nom aurait été foudroyé par une crise cardiaque après que les inspecteurs lui ont annoncé un redressement fiscal de plusieurs dizaines de millions de F CFA : "Lorsque l'inspecteur des impôts lui a dit ce qu'il devait à l'Etat, il a compris que c'est la ruine qui le guettait. Alors il a commencé à suer à grande goutte et il a arrêté sa poitrine. Transporté à l'hôpital, il est passé de vie à trépas", rapporte une source camerounaise.
L'autre opérateur économique, promoteur de l'agence de voyage "Binam Voyages" aurait connu lui aussi le même sort. Il était entré dans une grave dépression depuis le passage des inspecteurs des impôts qui lui avaient aussi annoncé un redressement fiscal. Il était mort lui aussi quelques temps après.
Au Cameroun, on parle aussi de l'autre opérateur économique, Fokou Bernard promoteur du Groupe Fokou Fobert. Il opère dans le secteur des matériaux de construction, de l'industrie, de la construction routière. Il aurait décidé de délocaliser au Gabon et en Guinée Equatoriale pour protester contre ce qu'il considère comme le harcèlement fiscal.
Un autre homme d'affaire de Douala, jadis prospère m'annonçait dernièrement qu'il avait décidé de déclarer faillite à cause du harcèlement fiscal des inspecteurs de impôts : "Depuis que j'ai pris cette décision, je crois que je suis plus tranquille maintenant. Je trouve du temps pour m'occuper de ma santé. Maintenant que j'ai déclaré faillite, je ne sais pas chez qui ils viendront encore réclamer l'argent. Est-ce que l'impôt c'est pour tuer l'économie?", s'interroge t-il.
Tous ces drames, vécus par plus d'un opérateur économique au Cameroun à divers degrés, l'opinion camerounaise ne voit qu'une seule main, celle de Polycarpe Abah Abah, présenté dans certains milieux comme le diable incarné. L'inculpation de son épouse dans une affaire de détournement de deniers publics et sa libération en catimini avait fini de ternir l'image du Minéfi aux yeux de la population. Pour celle-ci, il n'était lui aussi qu'une fripouille, comme son épouse.
Peut-être que eux-mêmes les opérateurs économiques camerounais avaient pris l'habitude de faire les affaires en s'arrangeant avec les agents des impôts, privant ainsi les caisses de l'Etat des ressources substantielles. Pratique à laquelle Abah abah a certainement voulu mettre fin. Peut-être, si on se laisse aller à la théorie du complot qui n'est jamais loin de ces commentaires autour du harcèlement fiscal, Abah Abah ne serait que le bras armé qui veut les asphyxier. Pour quelle raison?
ET POURTANT…
Abah Abah, je l'avais connu dans les années 90, plus exactement en 1994. Il était conseiller technique dans les services du Premier ministre où il menait la réforme fiscale. J'y étais allé en compagnie de Atemebang Achu, un confrère et ami, aujourd'hui disparu, qui était très proche de lui. Je l'avais trouvé très enthousiaste et très volontaire. Il semblait maîtriser son sujet. Il m'avait offert un exemplaire de son rapport et j'avais exploité quelques extraits dans mes papiers Il sera par la suite nommé directeur de impôts avant d'être propulsé ministre de l' Economie et Finances. Et puis il était devenu très impopulaire dans l'opinion.
Après cette rencontre, je ne l'avais plus jamais rencontré mais j'étais resté marqué notre rencontre. Et j'avais de la peine à croire qu'un homme aussi volontaire pouvait dévier au point de ne devenir qu'un vulgaire cerbère doublé de pilleur de fond public impénitent. Il me souvient que je recevais très souvent les flèches de ses détracteurs lorsque j'affirmais qu'il est pour moi la personne indiquée à ces postes parce qu'il est dans son élément. Je leur disais qu'il est l'un des rares qui a une feuille de route qu'il s'était donné et qu'il avait réussi à faire accepter par le gouvernement.
D'autres n'hésitaient pas comme c'est de coutume au Cameroun de croire que mes prises de position n'étaient pas dénuées d'intérêts : "Si c'est parce que tu bouffes avec lui, pardon excuses-nous. Il nous énerve et il doit partir", disaient certaines personnes qui étaient particulièrement remontées contre lui. Elles me disaient que Abah Abah est très mauvais. Alors, je leur demandais pour qui il est mauvais: "Pour vous les opérateurs économique qui êtes à la recherche de votre profit maximum ou pour Paul Biya qui l'a nommé et qui attend de lui qui renfloue les caisses de l'Etat. Je leur disais que, lorsque son patron Paul Biya se rendra compte qu'il est mauvais pour lui, il l'enlèvera. ". C'est ce qui vient d'arriver et c'est le destin des fusibles.
Au demeurant, l'action de Abah Abah a-t-elle été complètement noire pour l'économie camerounaise et le Cameroun tout court? Que non. En renflouant les caisses de l'Etat par les moyens qui étaient les siens et qui c'est vrai ne faisaient pas l'unanimité, Abah Abah a permis à l'administration camerounaise d'éviter le ridicule qui consistait à acheter les voitures d'occasion et être la risée de ces mêmes opérateurs économiques savaient si bien jouer les victimes.
Ce qui est vrai c'est que, porté par son enthousiasme et son volontarisme, Abah Abah a voulu mettre une pression un peu trop forte. Dans beaucoup de domaine, il a fait du copier coller entre le modèle fiscal français et le modèle camerounais. Il imposait ainsi un modèle conçu pour la France dans une société camerounaise qui est complètement différente. Cette inadéquation a fini par ne privilégier que le coté répressif de l'impôt contribuant ainsi à créer des relations plus que distendues entre l'Etat et le secteur privé. C'est pourquoi, au cours du conseil des ministres du 13 septembre 2007, qui a suivi le réaménagement du gouvernement, le Président Paul Biya, dans un désaveu complet de la politique fiscal menée par son ancien ministre de l'Economie et Finances, "recommande de modifier l'attitude à l'égard du secteur privé, notamment en matière de fiscalité, en la rendant plus incitative". Voilà qui est dit et qui va redonner du baume au cœur des opérateurs économiques.
L'autre problème que Abah Abah n'a pas résolu c'est celui de l'équité de l'impôt et finalement une sorte d'égalité de tous les citoyens devant ce devoir. Or au Cameroun, il y a beaucoup de personnes qui bénéficient des passe droit pour ne pas payer les impôts alors qu'elles réalisent parfois des profits faramineux. Il s'agit de tous ces hommes d'affaires qui se réfugient dans le parti au pouvoir. Il s'agit aussi des expatriés qui obtiennent des exonérations injustifiées. L'impôt au Cameroun devient donc le fardeau des faibles qui n'ont personne au sommet de l'Etat. C'est aussi ici qu'il faut venir trouver les raisons de l'impopularité croissante et inquiétante de Polycarpe Abah Abah.
Resté longtemps sourd aux plaintes des opérateurs économiques et même des Camerounais en général, Paul Biya a enfin a compris que Abah Abah pouvait lui nuire personnellement. Il a compris que le fusible avait complètement grillé et pouvait ne plus le protéger. C'est pourquoi il a accédé à la demande d'holocauste des camerounais en leur balançant enfin son argentier. A ce stade, le peuple camerounais est comparable à une meute de chiens affamés. Chaque fois, le pouvoir suce jusqu'à l'os, un des leurs qu'il avait choisi et le leur balance. Alors, ils se précipitent pour le déchirer. Demain, ce sera un autre serviteur tombé en disgrâce qui leur sera servi. Un jour peut-être, un dernier sacrifié sera "l' Agneau de Dieu qui vaincra ce monde inique !"
Par Etienne de Tayo
La première personne que j'ai contactée n'a pas caché sa satisfaction par rapport au départ du ministre de l'Economie et Finances, Polycarpe Abah Abah : "Nous avons fêté le départ de Abab Abah. Il a failli nous tuer avec les impôts. Si je n'étais pas très solide, j'aurai moi-même eu un arrêt cardiaque comme les autres", dit-elle. Cette personne m'annonce aussi qu'avec le départ de Abah Abah, c'est la prospérité économique qui s'annonce pour le Cameroun : "Sarkozy a dit qu'il va nous aider. Et nous savons qu'il fait toujours ce qu'il dit. Nous sommes très confiants", dit-elle en faisant à sa manière la lecture du discours de Sarkozy à Dakar qui pourtant dans les milieux intellectuels africains avait reçu une volée de bois vert. Et j'ai compris l'écart qui existe encore en Afrique entre le discours des intellectuels et la compréhension de l'opinion de la base. Cette préoccupation, je l'avais déjà ressentie avant de rédiger une réflexion intitulée : "Les défis des intellectuels africains de la diaspora". Cette personne, je l'ai rappelé trois jours après et elle m'a annoncé non sans satisfaction que "les auditions de Abah Abah avait déjà commencé à la police". Des informations pas toujours vérifiées qui sont souvent aussi malheureusement relayées par la presse camerounaise où on annonce une deuxième opération épervier : "Abah Abah et Cie annoncés au Sed", titre le Messager, l'un des principaux quotidien privé camerounais.
Une deuxième personne que j'ai appelée est celle qui m'avait déjà annoncé une fois avec une pointe de fierté que "au Cameroun, nous sommes maintenant gouverné par l'ambassadeur des Etats-Unis. Il donne les ordres et notre président exécute". J'en avais été choqué. Que nous soyons tombé si bas au point d'être dirigé par l'ambassadeur d'un autre pays, fut-il une grande puissance. Cette personne est donc revenue cette fois pour me faire d'autres annonces. Selon elle, c'est finalement le fonds monétaire international dont une mission se trouve au Cameroun qui a finalement obtenu la tête d'Abah Abah.. Elle m'a dit aussi que l'ambassadeur des Etats-Unis (encore lui!) a demandé de tout faire pour que l'opposition ait un groupe parlementaire à l'Assemblée nationale au risque pour le Cameroun de représenter aux yeux du monde l'image d'une démocratie monopartisane. Et c'est comme çà qu'elle explique le lâchage des ténors politique du Rdpc comme Françoise Foning, la députée-Maire de Douala 5e qui a vu ses deux élections annulées par la cour suprême.
Mais la vedette au Cameroun reste Polycarpe Abah Abah, le parfait fusible. Et il faut se lever très tôt pour lui voler la vedette. En fait, dans l'opinion camerounaise, on accuse l'ancien ministre de l'Economie et Finances de crimes collatéraux ou si vous voulez d'homicide involontaire. On parle particulièrement à Yaoundé du cas de deux hommes d'affaires promoteurs d'agences de voyages.
Tala Voyages, le propriétaire de l'agence qui porte son nom aurait été foudroyé par une crise cardiaque après que les inspecteurs lui ont annoncé un redressement fiscal de plusieurs dizaines de millions de F CFA : "Lorsque l'inspecteur des impôts lui a dit ce qu'il devait à l'Etat, il a compris que c'est la ruine qui le guettait. Alors il a commencé à suer à grande goutte et il a arrêté sa poitrine. Transporté à l'hôpital, il est passé de vie à trépas", rapporte une source camerounaise.
L'autre opérateur économique, promoteur de l'agence de voyage "Binam Voyages" aurait connu lui aussi le même sort. Il était entré dans une grave dépression depuis le passage des inspecteurs des impôts qui lui avaient aussi annoncé un redressement fiscal. Il était mort lui aussi quelques temps après.
Au Cameroun, on parle aussi de l'autre opérateur économique, Fokou Bernard promoteur du Groupe Fokou Fobert. Il opère dans le secteur des matériaux de construction, de l'industrie, de la construction routière. Il aurait décidé de délocaliser au Gabon et en Guinée Equatoriale pour protester contre ce qu'il considère comme le harcèlement fiscal.
Un autre homme d'affaire de Douala, jadis prospère m'annonçait dernièrement qu'il avait décidé de déclarer faillite à cause du harcèlement fiscal des inspecteurs de impôts : "Depuis que j'ai pris cette décision, je crois que je suis plus tranquille maintenant. Je trouve du temps pour m'occuper de ma santé. Maintenant que j'ai déclaré faillite, je ne sais pas chez qui ils viendront encore réclamer l'argent. Est-ce que l'impôt c'est pour tuer l'économie?", s'interroge t-il.
Tous ces drames, vécus par plus d'un opérateur économique au Cameroun à divers degrés, l'opinion camerounaise ne voit qu'une seule main, celle de Polycarpe Abah Abah, présenté dans certains milieux comme le diable incarné. L'inculpation de son épouse dans une affaire de détournement de deniers publics et sa libération en catimini avait fini de ternir l'image du Minéfi aux yeux de la population. Pour celle-ci, il n'était lui aussi qu'une fripouille, comme son épouse.
Peut-être que eux-mêmes les opérateurs économiques camerounais avaient pris l'habitude de faire les affaires en s'arrangeant avec les agents des impôts, privant ainsi les caisses de l'Etat des ressources substantielles. Pratique à laquelle Abah abah a certainement voulu mettre fin. Peut-être, si on se laisse aller à la théorie du complot qui n'est jamais loin de ces commentaires autour du harcèlement fiscal, Abah Abah ne serait que le bras armé qui veut les asphyxier. Pour quelle raison?
ET POURTANT…
Abah Abah, je l'avais connu dans les années 90, plus exactement en 1994. Il était conseiller technique dans les services du Premier ministre où il menait la réforme fiscale. J'y étais allé en compagnie de Atemebang Achu, un confrère et ami, aujourd'hui disparu, qui était très proche de lui. Je l'avais trouvé très enthousiaste et très volontaire. Il semblait maîtriser son sujet. Il m'avait offert un exemplaire de son rapport et j'avais exploité quelques extraits dans mes papiers Il sera par la suite nommé directeur de impôts avant d'être propulsé ministre de l' Economie et Finances. Et puis il était devenu très impopulaire dans l'opinion.
Après cette rencontre, je ne l'avais plus jamais rencontré mais j'étais resté marqué notre rencontre. Et j'avais de la peine à croire qu'un homme aussi volontaire pouvait dévier au point de ne devenir qu'un vulgaire cerbère doublé de pilleur de fond public impénitent. Il me souvient que je recevais très souvent les flèches de ses détracteurs lorsque j'affirmais qu'il est pour moi la personne indiquée à ces postes parce qu'il est dans son élément. Je leur disais qu'il est l'un des rares qui a une feuille de route qu'il s'était donné et qu'il avait réussi à faire accepter par le gouvernement.
D'autres n'hésitaient pas comme c'est de coutume au Cameroun de croire que mes prises de position n'étaient pas dénuées d'intérêts : "Si c'est parce que tu bouffes avec lui, pardon excuses-nous. Il nous énerve et il doit partir", disaient certaines personnes qui étaient particulièrement remontées contre lui. Elles me disaient que Abah Abah est très mauvais. Alors, je leur demandais pour qui il est mauvais: "Pour vous les opérateurs économique qui êtes à la recherche de votre profit maximum ou pour Paul Biya qui l'a nommé et qui attend de lui qui renfloue les caisses de l'Etat. Je leur disais que, lorsque son patron Paul Biya se rendra compte qu'il est mauvais pour lui, il l'enlèvera. ". C'est ce qui vient d'arriver et c'est le destin des fusibles.
Au demeurant, l'action de Abah Abah a-t-elle été complètement noire pour l'économie camerounaise et le Cameroun tout court? Que non. En renflouant les caisses de l'Etat par les moyens qui étaient les siens et qui c'est vrai ne faisaient pas l'unanimité, Abah Abah a permis à l'administration camerounaise d'éviter le ridicule qui consistait à acheter les voitures d'occasion et être la risée de ces mêmes opérateurs économiques savaient si bien jouer les victimes.
Ce qui est vrai c'est que, porté par son enthousiasme et son volontarisme, Abah Abah a voulu mettre une pression un peu trop forte. Dans beaucoup de domaine, il a fait du copier coller entre le modèle fiscal français et le modèle camerounais. Il imposait ainsi un modèle conçu pour la France dans une société camerounaise qui est complètement différente. Cette inadéquation a fini par ne privilégier que le coté répressif de l'impôt contribuant ainsi à créer des relations plus que distendues entre l'Etat et le secteur privé. C'est pourquoi, au cours du conseil des ministres du 13 septembre 2007, qui a suivi le réaménagement du gouvernement, le Président Paul Biya, dans un désaveu complet de la politique fiscal menée par son ancien ministre de l'Economie et Finances, "recommande de modifier l'attitude à l'égard du secteur privé, notamment en matière de fiscalité, en la rendant plus incitative". Voilà qui est dit et qui va redonner du baume au cœur des opérateurs économiques.
L'autre problème que Abah Abah n'a pas résolu c'est celui de l'équité de l'impôt et finalement une sorte d'égalité de tous les citoyens devant ce devoir. Or au Cameroun, il y a beaucoup de personnes qui bénéficient des passe droit pour ne pas payer les impôts alors qu'elles réalisent parfois des profits faramineux. Il s'agit de tous ces hommes d'affaires qui se réfugient dans le parti au pouvoir. Il s'agit aussi des expatriés qui obtiennent des exonérations injustifiées. L'impôt au Cameroun devient donc le fardeau des faibles qui n'ont personne au sommet de l'Etat. C'est aussi ici qu'il faut venir trouver les raisons de l'impopularité croissante et inquiétante de Polycarpe Abah Abah.
Resté longtemps sourd aux plaintes des opérateurs économiques et même des Camerounais en général, Paul Biya a enfin a compris que Abah Abah pouvait lui nuire personnellement. Il a compris que le fusible avait complètement grillé et pouvait ne plus le protéger. C'est pourquoi il a accédé à la demande d'holocauste des camerounais en leur balançant enfin son argentier. A ce stade, le peuple camerounais est comparable à une meute de chiens affamés. Chaque fois, le pouvoir suce jusqu'à l'os, un des leurs qu'il avait choisi et le leur balance. Alors, ils se précipitent pour le déchirer. Demain, ce sera un autre serviteur tombé en disgrâce qui leur sera servi. Un jour peut-être, un dernier sacrifié sera "l' Agneau de Dieu qui vaincra ce monde inique !"
Par Etienne de Tayo