samedi 5 mars 2022

 


CONTRE LE CHINA BASHING, POUR LA COEXISTENCE PACIFIQUE ET PROSPERITE PARTAGEE

Le 8ème sommet de la coopération sino-africaine s’est tenu à Dakar du 28  au 30 novembre 2021. Centré sur le commerce et la sécurité, ce sommet a été l’occasion d’annonces fortes de la part du partenaire chinois qui revendique 200 milliards de dollars d’échanges directs en 2019 avec l’Afrique. Ainsi, Pékin annonce  60 milliards de dollar d’aide au continent  et un don d’un milliard de doses de vaccin anti-Covid.

Comme toujours, ces noces sino-africaines ont déclenché de la part de certains médias occidentaux, de véritables envolées de bois vert. Avec des Africains comme cible, ces médias tentent un dénigrement systématique de tout ce que la Chine entreprend en Afrique. Voici du reste quelques titres de cette véritable tentative de déconstruction de la dialectique sino-africaine :

-          « Entre l’Afrique et la Chine, est-ce le temps des désillusions ? » (TV5 Monde) ;

-          « L’illusion de la recette magique des prêts chinois » (www.DW.com)

-          « Chine-Afrique : un bénéfice mutuel ? » (TV5 Monde) ;

-          « Forum Chine-Afrique : l’heure des vérités à Dakar ? » (Le Point)

Sans attendre les conclusions et sans évaluation aucune, ces médias ont qualifié la rencontre de Dakar de « Forum de la désillusion ». Ils le disent en actionnant le levier du China bashing connu comme une campagne de dénigrement et d’accusation de la Chine dans le but de la couper de l’Afrique et des Africains. Cette Afrique là toujours infantilisée, est considérée comme une chasse gardée des anciennes puissances coloniales qui vivent très mal la croissance qualifiée d’insolente et la pleine intégration de la Chine dans le circuit économique mondialisé.

Dans cette étude, nous irons aux fondements du China Bashing tels qu’ils apparaissent  aux nations occidentales, à leur presse et à leurs intellectuels. Nous visiterons ensuite les clichés qu’ils actionnent pour justifier leurs attitudes  mais surtout pour manipuler la cible africaine. Enfin, au travers d’une sorte de kaléidoscope des ressentis et d’une analyse sémantique de cette campagne de dénigrement, nous tenterons de révéler de quoi le China bashing est réellement le nom. En conclusion, nous dirons pourquoi, la voie de la Chine, à savoir celle de la coexistence pacifique et de la prospérité partagée est la meilleure pour l’Afrique et pour l’humanité.

Loin d’être un jeu d’enfants, le China Bashing est une vraie stratégie de guerre, un construit idéologique aux fondements historiques bien établis. Ses piliers reposent sur un socle granitique construit depuis des siècles par les intellectuels occidentaux. Ceux là même qui avaient accompagné et justifié la colonisation ainsi que toutes les injustices qui l’ont caractérisée. Il en est ainsi du philosophe Ernest Renan, adepte de suprématie raciale qui, dans son ouvrage : « La réforme intellectuelle et morale » publié en 1871 et parlant des chinois déclare : « La nature a fait une race d’ouvriers, c’est la race chinoise d’une dextérité de mains merveilleuse, sans presque aucun sentiment d’honneur ».

Mais au contraire de l’arrogance et de la suffisance qui caractérisaient la génération des Renan,  les fondements contemporains du China Bashing s’énoncent sous la forme d’une peur à peine voilée d’un occident qui doute face à une Chine désormais éveillée et sûre d’elle. Dès lors, ces fondements apparaissent sous des figures métaphoriques diverses : une supercherie, une manipulation avec l’Afrique comme cible, un racisme,  un tacle arrière, une manifestation de l’inquiétude, une lâcheté, un fantasme, une légende, une ingratitude, un néocolonialisme, un thème de campagne électorale, un enjeu de politique étrangère.

LA CHINE PEUT TOUT

A l’origine de cette campagne sinophobe, il y a le dépassement concurrentiel de la Chine sur le terrain économico-commercial. En occident on ne voit plus qu’une « Chine destructrice des emplois du fait de sa capacité à capter les délocalisations des chaînes des productions d’entreprises étrangères en quête d’une main d’œuvre moins coûteuse et d’une fiscalité plus avantageuse » ; une Chine qui est à l’origine de la crise  des dettes souveraines et qui tend à faire pencher la balance du coté des pays émergents ; une Chine accusée d’orchestration d’un établissement hégémonique de ses entreprises sur le continent africain ; une Chine soupçonnée d’opacité de ses financements surtout en direction de l’Afrique ; une Chine qui est sur le point de s’offrir l’Afrique grâce à ses financements et ses réalisations.

Mais sous le registre de la manipulation, ces fondements du China Bashing ont été réduits à quelques clichés qui visent à construire pour la Chine l’image d’une sorte d’ogre mangeur d’enfants en Afrique. Et dans ce jeu, l’occident n’hésite pas à enfiler le manteau d’une mère protectrice de l’Afrique.  Ainsi, la présence chinoise en Afrique est réduite en trois plaies majeures comme le souligne l’éditorialiste de Jeune Afrique, François Soudan. Pour lui, les fondements du China Bashing selon les occidentaux sont : « les traités inégaux entre la Chine et les pays africains ; le pillage des ressources de l’Afrique par la Chine ; l’occupation coloniale des terres africaines par la Chine ». C’est sur ces trois accusations laconiques que repose en réalité le China Bashing définit à juste titre par Jean Joseph Boilot comme « le miroir de la faiblesse des occidentaux en Afrique »

Maintenant que nous avons saisi la vacuité du concept du China Bashing, la Chine imperturbable nous propose la coexistence pacifique et une prospérité partagée. Et l’Afrique le perçoit déjà dans l’acquisition de toutes les infrastructures dans les domaines routiers, énergétiques, portuaires, aéroportuaires, immobiliers… Cette approche chinoise portée aujourd’hui par le Président Xi Jinping, a été façonnée à partir des 5 événements qui ont marqué historiquement la marche de la Chine et qui ont façonné sa propre vision du monde. Ces événements sont : « les idées confucéennes ; le siècle des humiliations ; un allié oublié ; le Marxisme ; l’histoire de Taiwan ». Les fondements de cette politique non interventionniste de la Chine se trouve dans les « 5 principes de la coexistence pacifique » présenté par le Premier ministre Zhou Enlai lors de la conférence de Bandung en 1955. A savoir : « respect mutuel de l’intégrité territorial et de la souveraineté ; non agression mutuelle ; non ingérence mutuelle ; bénéfices mutuels ; coexistence pacifique ».

Comme nous le voyons, l’approche chinoise qui a mis l’occident sur la défensive, constitue un changement fondamental de paradigme dans la gouvernance mondiale. Conçu historiquement et mis en œuvre par les puissances occidentales, le monde était une sorte de marre dans laquelle les gros poissons se nourrissaient des petits ; où certains États se prévalant du droit divin de domination et d’exploitation des autres œuvraient à les maintenir dans la misère par les mécanismes iniques conçus et mis en œuvre au sein des organisations internationales aux ordres  censées pourtant œuvrer pour la paix et la prospérité.

L’irruption de la Chine et des pays émergents en général a réussi à faire de l’Afrique un véritable enjeu géostratégique. Aujourd’hui, cette Afrique là est placée au milieu du guet avec d’un coté comme de l’autre la proposition de deux visions du monde. Une première vision, celle des occidentaux qu’elle a expérimentée depuis des siècles et de laquelle elle tire son état d’aujourd’hui c'est-à-dire celui d’un continent en retard sur plusieurs domaines. Une deuxième vision, celle de la Chine qui s’exprime en actions et en réalisations et au miroir de laquelle l’Afrique voit sa physionomie se transformer et se bonifier. En d’autres temps, observant le potentiel et le réel de la coopération sino-africaine, nous avons pu dire que « Tout chemin mène en Chine » c'est-à-dire qu’il existerait une autre voie du développement de l’Afrique en dehors de ce que nous propose les occidentaux. Aujourd’hui, plus que jamais, il s’agit d’une piste à creuser par l’Afrique et les Africains.

Dr Etienne Tayo Demanou

Promoteur du réseau « Afrique intègre »

Auteur du livre : « Tout chemin mène en Chine »

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